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Psychologie

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12 juillet 2008 6 12 /07 /juillet /2008 10:41
Semaine du 12 au 18 juillet :
 
 
 
TELEVISION:
                       
 
        ¤¤  Metropolis : samedi 12 à 20h15  (ARTE)
l'un des sujets: Les cinéastes à l'opéra
 
 
        ¤¤  Concert: Airs sacrés de Mozart : dans la nuit de dimanche à lundi vers 2h30 du matin  (TF1)
[qui?... quoi?...]
 
 
        ¤¤  L'heure de l'opéra: Manon : lundi 14 à minuit 15  (France3)
Redif.
 
 
        ¤¤  La 9e symphonie de Beethoven (Orange) : dans la nuit de lundi à mardi vers 1h30 du matin  (France2)
Dir.: K. Masur
 
 
 
RADIO:
        
 
        ¤¤  Les symphonies 8 et 9 de Beethoven (TCE, en direct) : samedi 12 à 20h  (FM)
K. Masur - M. Diener; M.N. Lemieux; J. Silvasti; G. Zeppenfeld.
 
 
        ¤¤  Mémoire retrouvée : Gabriel Dussurget : dimanche 13 à 15h02  (FM)
 
 
        ¤¤  Sur tous les tons : Rencontres musicales de Savoie à Albertville : lundi 14 à 18h07  (FM)
Avec notamment Françoise Masset
 
 
        ¤¤  Intégrale des 6 motets de Bach (Beaune, 6 juillet 08) : lundi 14 à 20h  (FM)
J. Suhubiette - Les Eléments; Ensemble Jacques Moderne.
 
 
        ¤¤  Récital de Jennifer Smith (Hôtel de Lauzun, juin 08) : lundi 14 à 21h30  (FM)
M. Muller, viole de gambe; Chia-Pin Kuo, piano
Programme: Purcell, M.A. Charpentier, Sainte-Colombe et Marais.
 
 
        ¤¤  Symphonies, sonates et motets (Saint-Michel en Thiérache, juin 08) : mardi 15 à 10h02  (FM)
L. Garcia Alarcon - M. Flores, K. Polverelli
Oeuvres de Monteverdi, Rossi, Marazzoli, Van Eyck, Cavalli, Froberger, Legrezi, Zamboni, Kempis.
 
 
        ¤¤  Concert Haydn / Kraus / Telemann (Cité de la musique, janvier 08) : mardi 15 à 20h  (FM)
G. Antonini - CMBV - L. Scherrer; M.C. Chappuis; M. Ullmann; K. Mertens...
 
 
        ¤¤  L'infedelta' delusa de Haydn (Aix, juillet 08) : mardi 15 à 22h  (FM)
J. Rhorer - C. Debono; I. Kringelborn; J. Elliott; Y. Saelens; A. Wolf
 
 
        ¤¤  Fedra de Pizzetti (Montpellier, en direct) : mercredi 16 à 20h  (FM)
E. Mazzola - H. Papian; G. Porta; Chang Han Lim; C. Knorren...
 
 
        ¤¤  La Chauve-souris de J. Strauss (Bordeaux, juin 08) : jeudi 17 à 20h  (FM)
T. Rösner - G. Ragon; C. Perrin; J. Ségani; N. Stutzmann; E. Huchet...
 
 
        ¤¤  Concert des solistes du Centre national d'artistes lyriques (Montpellier, juillet 08) : vendredi 18 à 15h  (FM)
Hye Myung Kang; Chang-Han Lim; Wenwei Zhang

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11 juillet 2008 5 11 /07 /juillet /2008 22:33
Voilà le premier article d'un ami, Inc', qui a assisté à ce spectacle que j'ai honteusement séché.

Melancholia de G.F.Haas
Livret de Jon Fosse
d'après la première partie de son roman Melancholia I


Mise en scène Stanislas Nordey
Décors Emmanuel Clolus
Costumes Raoul Fernandez
Lumières Philippe Berthomé

Lars Otto Katzameier
Helene Melanie Walz
Herr Winckelmann Johannes Schmidt
Frau Winckelmann Ruth Weber
Alfred Daniel Gloger
Kellnerin Annette Elster
Bodom Martyn Hill

Klangforum Wien - Vokalensemble NOVA
Direction musicale Emilio Pomarico



Une création mondiale revêt toujours un caractère particulier, ne serait-ce que pour l'atmosphère particulière qui règne dans la salle. Ici, pour Melancholia, de Georg Friedrich Haas - je n'étais malheureusement pas à la véritable première - le public était principalement constitué de touristes de nationalités diverses, qui venaient certainement plus pour visiter l'intérieur de Garnier et le prendre en photos, ce qu'ils firent allègrement à la fin de la représentation, que pour l'opéra lui-même. Est-ce que ce fait permet à lui seul d'expliquer l'accueil plus que mitigé reçu par l'oeuvre, je n'en suis pas sûr.

 


Melancholia avait toutes les caractéristiques requises pour ne pas plaire à un certain public de Garnier, celui qui va à l'opéra "pour s'y montrer" (et éventuellement dépenser un trop-plein d'argent) : une musique expérimentale très difficile, surtout si l'on a du mal avec le contemporain, une mise en scène de Stanislas Nordey très sombre et minimaliste, un livret de Jon Fosse qui se répète, qui tourne en rond, une majorité de chanteurs débutants et pas d'entracte.


Melancholia est un opéra court, inspiré d'un épisode de la vie de Lars Hertervig, peintre norvégien de la seconde moitié du XIXème. Lars Hertervig souffrait d'une maladie mentale, traduite dans l'opéra par une schizophrénie doublée d'une paranoïa : les pensées contradictoires du personnage sont représentées par un choeur réduit habillé de noir, qui l'accable de reproches, tandis que lui-même, habillé de blanc, ne tarit pas d'éloges sur son propre talent. Cette opposition noir/blanc n'a rien d'original, de plus les murs de la pièce sont noirs également. Seule tentative de recherche de la part du metteur en scène : une immense toile blanche flotte au milieu de la scène et bouge plus ou moins au rythme de la musique, si tant est qu'elle en ait un. Cette toile représente évidemment un autre élément de pensée du peintre : son art ; mais est également une preuve supplémentaire de sa fragilité psychologique : l'angoisse de la toile blanche ? Il s'avère que tous les personnages, à part Lars, sont vêtus de noir, sauf l'adolescente de quinze ans dont il tombe amoureux, Hélène, qui, tenez-vous bien, est tout comme Lars vêtue de blanc ! Mais Hélène est jeune, et est la fille du propriétaire de l'appartement où Lars vient d'emménager, et évidemment sa liaison avec le peintre est mal vue par les parents, et celui-ci doit donc partir sur-le-champ.


Dans l'acte suivant, Lars se rend dans une brasserie où vont souvent les autres peintres de la ville. La toile joue alors le rôle novateur et ironique de barrière qui le sépare des autres peintres, qui, l'acceuillant au départ, l'accablent ensuite de reproches. On voit bien là, après sa schizophrénie, la paranoïa du peintre s'exprimer. De retour dans son ancien appartement, l'opéra se termine sur Lars, trahit par tous, même par Hélène, qui à la fin, revêt à son tour le noir des autres personnages. Une trouvaille de mise en scène qui a probablement demandé des mois de recherche.

 


Rien à redire pour l'orchestre, et difficile dans ce cas de faire une critique de la direction d'Emilio Pomarico, qui, comme 7 des 8 principaux chanteurs, débutait à l'Opéra de Paris. Seul Lars (Otto Katzameier) n'était pas un néophyte ici, et sa maîtrise du personnage comme sa voix furent très agréable. Au passage, mention spéciale au contre-ténor Daniel Gloger.

 


Mais ce qui est particulièrement intéressant et réussi dans cet opéra, c'est le rendu de l'angoisse extrême ressentie par le peintre. En effet, la musique, essentiellement chromatique, jouant sur les harmoniques, sans véritable mesure, mêlant des sons stridents - parfois à la limite du supportable pour l'auditeur - et sourds, et par moments répétitive, traduit de manière convaincante la détresse de Lars. Elle correspond très bien au livret, qui se répète à l'infini - jusqu'à l'épuisement apparent de certaines personnes de la salle - et dont le texte n'avance pas, revient sur lui-même, patauge dans des compositions en abyme, ce qui a pour effet secondaire de donner des longueurs apparentes à l'opéra, qui est pourtant très court (1h30). Cet ennui ressenti par certains est dommage, puisqu'il n'est qu'une conséquence inévitable de la réussite de ce sur quoi le compositeur a voulu insister. La schizophrénie, traduite par le choeur d'hommes et femmes en noir, groupé d'un côté de la scène (aurait-il été plus intéressant de les répartir sur la scène pour accentuer l'impression d'étouffement ?) et dont les paroles, au tempo instable, sans cesse accélérant, montrent toujours une progression vers l'aigu, et la paranoïa, traduite en particulier par deux peintres soi-disant amis de Lars, qui jaillissent sans cesse de derrière la toile/barrière au deuxième acte, sont fortement ressenties par l'auditeur. Et, en sortant, mis étrangement sympathiquement mal à l'aise par la musique, maugréant contre un public ayant réussi à donner une nouvelle dimension au mot "désagréable", on se rend compte que l'on a pris en pitié ce peintre, à la fois mégalomane et se haïssant, et dont Hélène, dans sa robe blanche, était la seule sauveuse possible. Lars Hertervig mourra dans un asile, pauvre et fou, sans aucune reconnaissance de son art.

 

Inc'

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10 juillet 2008 4 10 /07 /juillet /2008 17:00
Louise de Charpentier
Roman musical en quatre actes (1900)
Livret du compositeur

Mise en scène André Engel
Décors Nicky Rieti
Costumes Chantal de La Coste Messelière
Lumières André Diot
Dramaturgie Dominique Muller

Louise Mireille Delunsch
La mère Jane Henschel
Julien Grégory Kunde
Le père Alain Vernhes
Un noctambule, le pape des fous Luca Lombardo

Irma Marie-Paule Dotti
Camille Natacha Constantin
Gertrude Anne Salvan
Elise Laurence Collat
Suzanne Letitia Singleton
Marguerite Cornelia Oncioiu
L’apprentie Elisa Cenni
Un chiffonnier René Schirrer
Le chansonnier Jason Bridges
Le colleur d’affiches Bartlomiej Misiuda

Orchestre et Choeurs de l’Opéra national de Paris
Maîtrise des Hauts-de-Seine/Choeur d’enfants de l’Opéra national de Paris

Chef des Choeurs Alessandro Di Stefano
Direction musicale Patrick Davin



Je savais bien que je n'aurais pas du y aller! Je le savais! Déjà à la création, je m'étais sagement tenu à l'écart, la présence Sylvain Cambreling aidant. Mais cette année, l'absence de ce dernier, la présence de Delunsch, de Kunde, de Vernhes, l'attachement de Mortier à cette oeuvre et l'assurance d'avoir une très bonne place au parterre pour 5€, je me suis décidé! Mon Dieu quelle merde que cette oeuvre! Je pensais être immunisé après avoir vu Zampa, ben je me trompais, on peut faire pire! Quand on voit ça, on prend d'autant plus conscience du génie d'oeuvres telles qu'Arianne et Barbe-Bleue, Pélléas et Mélisande ou Padmavati pour rester en France avec des oeuvres montées réçemment. Et puisqu'on est en 1900, on peut taper sur le pathos de Tosca, mais cela reste infiniment supérieur à ce truc, et je n'arrive pas à comprendre pourquoi Mortier y tient tant, au point de le reprogrammer pour 12(!!) représentations, un an après la création (d'où une salle à moitié vide et je n'exagere pas).



Chef d'oeuvre de son auteur, Charpentier a ici écrit la musique et le livret, commençons par ce dernier qui vaut son pesant de cacahuètes (et y a de quoi faire passer Wagner et Berlioz pour des génies littéraires). Y étant allé avec des amis, j'ai pu faire un debriefing posttraumatique dont je vous livre ici le résultat.
Dramatiquement c'est incohérent: au début, tandis que le père semble d'accord, c'est la mère qui s'oppose à la relation entre Louise et Julien, puis c'est elle qui va chercher Louise et à la fin c'est le père qui s'oppose à leur relation au point de virer la gamine du foyer. Tout cela aurait été interessant, si on avait vu les parents changer d'avis, mais non. D'ailleurs tous les dialogues sont construits de la même façon: on est pas d'accord, ok, mais chantons le pendant 20 minutes histoire d'être sur; aucune évolution. Et vas-y que je te fous des scènes interminables censées faire pleurer dans les chaumières à force d'insistance pathétique (la lamentation du père au dernier acte!). Ensuite, le personnage de Louise est inexistant: quand elle ne redit pas à son amant ce que lui a dit son père, elle redit à son père ce que lui a dit son amant, belle image de la femme! Enfin l'oeuvre est farcie de passages folkloriques pour l'effet de réel (vous savez, ce qui fait toute la saveur des téléfilms du terroir genre Louis la Brocante!), tous plus ridicules les uns que les autres: on a le droit à tout le marché (marchands d'habits, de carotte, de patates, de verduresse, de fontaine de cresson...), les dialogues de sortie du métro ("-Bonjour - Ca va?"), l'élection de Miss "Butte sacrée" (on ne rit pas!), et un passage du chanteur de Mexico dans le métro ("Je suis le plaisIIIIIIIr de ParIIIIIs!"), donc on peut le dire: Charpentier annonce Luis Mariano. Seule la scène finale est réussie (on apprend au passage après 3 heures de spectacle que le père s'appelle Pierre, information capitale, mais n'y voyez aucune métaphore, tout ici est premier degré, on est chez les ouvriers je vous rappelle, un peu de réalisme!) lorsque le père devient fou furieux tandis que Louise est en plein délire libertaire, mais on aurait mieux fait de couper le "O Parrrrris!!!" du père qui clot l'oeuvre.

Autre problème, il s'y croit le Gustave et coté style on s'amuse! Je ne fais d'habitude pas la fine bouche sur le style des livrets, étant habitués à leur médiocrité, mais là on touche le fond: tout n'est que stéréotype. Vous me direz, chez Handel aussi! Certes mais avec des variations, des images renouvellées. Ici on tricote des grands mots à longueur de phrase et l'on vante le bonheur de la vie merveilleuse et jolie du poète et l'amour sur les toits de Paris, ville infinie de la liberté et de mes désirs, c'est le paradis, non c'est la vie, ah respire, tu es heureuse et ton ame vit mon amour sous le ciel éclatant de Paris. Parfois on nous donne des élisions argotiques et on nous parle sans rire de la "petite montmartroise au coeur dormant". Mais le mieux c'est lorsque le Pape des fous s'exprime, je cite:


O jolie!
Cette danseuse
est une fleur de vie
faite d'un peu de chacun de nous tous.
Et cette fleur vivante,
c'est notre âme.
Sous la forme d'une fleur
qui serait une femme,
Fleur-femme,
dont la grâce, le parfum
se traduisent en cadences
afin que tes sens
aussi bien que ton âme
puissent apprécier l'hommage suprême!

On est bien d'accord, ça ne veut rien dire! Je sais pas vous, mais moi ça m'évoque irresistiblement le "Maladroit" dans les Exercices de style de Queneau. D'ailleurs ça se dit "O jolie"?! La seule audace du livret est dans la bouche de Louise: "Julien! Prends moi!", mais je ne sais pas si cette expression avait déjà le sens actuel en 1900... Par dessus le marché, quand on se renseigne sur l'oeuvre on ne cesse de nous vanter le "réalisme symboliste" de Charpentier qui souligne la poésie des petites gens: je trouve ça très méprisant pour ces derniers de faire passer de la nullité littéraire pour leur mode d'expression lyrique, donc profond, comme si il ne pouvait ressentir que par stéréotype et convention, tu parles d'une liberté! Et puis cela n'a rien de novateur de mettre des petites gens sur la scène d'un opéra, à l'Opéra Comique peut-être, mais cela existe depuis un moment en 1900, cela s'appelle le vérisme! Bref si l'on veut comprendre la poésie des petites gens, on se tournera plutôt vers un film de Pasolini que vers ce drame confit dans la stupidité d'une idéologie faussement socialiste.



Mais la musique vient sauver tout ça, non? Ben non! C'est ronflant, cela oscille entre le lourdingue et l'inepte, c'est farci d'interludes symphoniques tous plus fades les uns que les autres (maintenant je sais où Messager a trouvé l'inspiration pour Véronique), quand ce n'est pas aseptisé c'est grossier (les cuivres, la guitarre pendant l'air de Julien devant l'Atelier...). Affligeant. Les deux seuls moments interessants sont le grand air de Louise "Depuis le jour" à l'orchestration finnement variée concentrant divers leitmotiv et le final.



Dans le genre opéra naturaliste, on m'avait parlé de titre accrocheurs comme L'Attaque du moulin ou La Lepreuse, franchement il doit y avoir là dedans plus de consistance que dans Louise et la seule façon de rendre ça suportable, c'est un bon délire outrancier de Regitheater.



Alors avec ça, allez critiquer la production! La mise-en-scène d'André Engel est sans surprise, comme d'habitude, tout repose sur les nombreux, changeants et imposants décors aux murs aussi javelisés que la musique et crédibles que le livret; des éclairages efficaces mais parfois etrangement faiblards (le ciel pour la scène sur les toits!); une direction d'acteurs classique et peu signifiante; la transposition dans les années 40 n'apporte rien, si ce n'est des costumes plus cheap. Quelques idées: le cadre de scène tantôt restreint tantôt large pour signifier l'opposition entre emprisonnement familial et liberté amoureuse; les passants à la sortie du métro qui marchent un court instant en accéléré comme dans un film muet...



Tant de bon chanteurs dans tant d'indigence, cela attriste: Mireille Delunsch dans un rôle transparent et faussement torturé, quel gachis; Alain Vernhes, superbe basse française qui devrait plutôt chanter les diables dans Les Contes d'Hoffman, quel est l'interêt d'un français si limpide et de phrasés si délicats pour chanter de telles sornettes emphasées; Gregory Kunde qui fait encore merveille dans Rossini, en fait trop et déborde de partout tant vocalement que théâtralement, donner de la consistance à ce rôle de poète bohème à la petite semaine n'est pas chose aisée. Jane Henschel braille, mais dans ce rôle caricatural de vielle conne qui se transforme incompréhensiblement en mère aimante, on ne peut pas lui en demander plus. Tous les seconds rôles font de leur mieux et sont bien chantés, mais je me suis tellement emmerdé que je serais incapable de vous détailler leurs mérites respectifs. L'Orchestre et le Choeur de l'Opéra de Paris dirigés par Patrick Davin ne font pas beaucoup d'efforts et sauvent ce qui peut l'être.

Bref, Louise, plus jamais!


Copyright Photos: Eric Mahoudeau / Opéra National de Paris
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9 juillet 2008 3 09 /07 /juillet /2008 22:45
Porgy and Bess de Gershwin
Livret de DuBose, Dorothy Heyward et Ira Gershwin


Mise-en-scène Robyn Orlin
Scénographie Alexandre de Dardel
Chorégraphie Olivier Bériot
Vidéo Philippe Lainé
Lumières Marion Hewlett    

Porgy  Kevin Short
Bess Indira Mahajan
Crown Daniel Washington
Serena Angela Simpson
Sportin’ Life Jermaine Smith
Clara Laquita Mitchell
Maria Bonita Hyman
Jake Eric Greene
Mingo Chauncey Packer
Peter  Calvin Lee
Robbins Barron Coleman
Frazier  Uzee Brown Jr
Jim, Undertaker Justin Lee Miller

New World Symphony
The Atlanta Opera Chorus
Direction musicale Wayne Marshall





Tout excité à l'idée de découvrir en version intégrale cet opéra que je ne connaissais que par extraits, j'avais même réussi à me persuader que Robyn Orlin, après son ratage total à Garnier dans L'Allegro, il Penseroso ed il Moderato (sorte de sous Montalvo/Hervieu qui, par ailleurs mettaient aussi en scène ce Porgy au même moment mais à Lyon), trouverait ici des thèmes plus proches de son ésthétique et s'en sortirait mieux: errrrrreur! Commençons par le dire tout net: Porgy and Bess en entier, c'est long! Trois heures où le drame n'avance que par à coup puisque chaque scène dramatique est encadrée de prières et de tableaux plus folkloriques; heureusement la musique est splendide même si elle n'évite pas la répétition. Dans ces conditions, à moins d'une équipe musicale enthousiaste et d'un metteur-en-scène intelligent, c'est irreprésentable.

Pour la mise-en-scène intelligente, c'est raté. Robyn Orlin, chorégraphe à l'origine, n'a vraiment RIEN à dire, d'où une mise-en-scène indigente et fainénante qui ne fonctionne que grace à l'entrain et au professionalisme de la troupe. Comme pour L'Allegro, un décor fait de quatre murs entièrement blancs avec une table blanche pour seul mobilier, et un écran blanc courbé sur lequel sont projetées bien des choses. Et parlons en de ces choses! Les vidéos de Philippe Lainé nous montrent des scènes contemporaines de bidonville, filmées crument, censées être l'actualisation du drame. Or cela n'a rien à voir! Les bidonvilles résultent d'un marasme économique et social dans des zones du monde mises en marge de la mondialisation, or tous nos personnages ici ont un boulot (sauf Porgy du fait de son handicap), ils sont actifs, ont une vraie vie sociale, certes ils sont misérables, mais leur situation est loin d'atteindre celle des habitants de bidonville. Déjà la transposition est stupide (une actualisation facile: Gershwin annonce l'altermondialisme!) et déforme le propos initial. Dans un genre plus inutile: ce fourré battu par le vent dans la scène où Crown reconquit Bess. Dans un genre affligeant, mais comme c'est la seule "idée" de cette mise-en-scène, parlons en: la vidéo de l'oiseau en cage lorsque Bess avoue à Porgy être toujours irresistiblement attirée par Crown, ça va très loin dans l'interprétation donc... Il y a aussi celles qui sont filmées et projetées simultanément comme le visage du cadavre du mari de Serena ou la plongée capitale dans l'aquarium de Jake (là je veux bien qu'on m'explique!), ou bien celles qui sont projetées directement sur les personnages comme le bébé de Clara projeté sur le drap qu'elle tend entre ses deux mains. Le propos est simple, on est en pleine distanciation brechtienne (oui je sais, c'est dur à dire): plutôt que de montrer bêtement, introduisons la distance de la vidéo et incitons ainsi le public à réflechir avant que de s'émouvoir. Bien bien, sauf que pour que cela marche, encore faudrait-il qu'il ait des pistes de reflexions à se mettre sous la dent le public, et ce ne sont pas les vidéos répétitives ni les éclairages (basiques mais efficaces) qui vont l'y aider. Les costumes peut-être, tous les noirs sont habillés streetwear très coloré (sauf pour l'escapade dans l'île où ils sont tous en blanc avec des ombrelles, ça sent le ballet d'Alvin Ailey, Revelations, à plein nez mais pourquoi pas), Crown en cuir noir, Bess avec une robe rouge de pute et les blancs en costard et lunettes noires... pas de quoi se torturer la cervelle donc. Et on ne parlera pas des dix (voire plus) passages des artistes dans le parterre (quand c'est Serena ça va, quand c'est le marchand de patates, on a plus de mal à y donner du sens). Bon tant pis... Merci à Robyn Orlin de nous avoir rendu l'oeuvre extérieure et répétitive pendant 3 heures pour rien.



Heureusement la troupe musicale a fait tout le reste. Le New World Symphony et l'Atlanta Opera Chorus sont fabuleux, dirigés de façon vive et nuancée par Wayne Marshall, cette musique trépigne, palpite et explose avec un naturel confondant. A part la Serena incroyable d'Angela Simpson, à la voix puissante sur une tessiture étendue, parfaite actrice qui rendait poignante sa lamentation lors de la veillée funèbre de son mari assassiné, ou toutes les prières collectives qu'elle menait dans la plus parfaite tradition du gospel, il n'y a pas de grandes voix sur scène, mais des excellents acteurs oui. Et mieux vaut ça que l'inverse, étant donné l'incurie de la mise-en-scène. Le Porgy de Kevin Short est touchant; la Bess d'Indira Mahajan criarde: eurk ces aigus et ces attaques par en dessous, mais cela convient finalement bien à ce personnages de femme de mauvaise vie qui n'a jamais vraiment réussi à changer; le Crown de Daniel Washington impressionne plus par sa stature que par sa voix, mais la bête est là; le Sportin'Life electro de Jermaine Smith est parfait dans l'attitude clinquante et fieleusement cool, et quel dynamisme sur scène; enfin la Clara de Laquita Mitchell est un peu trop scolaire et tendue (c'était soir de première) pour rendre l'abandon du célèbrissime "Summertime". Les seconds rôles sont aussi de très bons acteurs, et personne, ne reste planté sur scène sans esprit; les chorégraphies d'Olivier Bériot étant sans doute ce qui fut le plus réussi visuellement (à ce propos, une chorégraphe qui délègue les chorégraphie dans sa propre mise-en-scène, faut le faire tout de même!).

Une bonne soirée réussie tout de même graçe à une équipe musicale enthousiasmante qui ne ménageait pas ses efforts. On saura grè au metteur-en-scène de ne plus venir nous emmerder avec ses production Commerce equitable, et de se cantonner à la danse.



*Copyright photos: E.Carecchio


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4 juillet 2008 5 04 /07 /juillet /2008 11:45
Semaine du 5 au 11 juillet :
 
 
 
TELEVISION:
                       
 
        ¤¤  Symphonie n° 8 "Des mille" de Mahler (Bercy, mars 08) : dimanche 6 à 19h  (ARTE)
Dir.: Eschenbach
 
 
        ¤¤  Heitor Villa-Lobos, l'âme de Rio (docu, 2007) : lundi 7 à 23h50  (ARTE)
 
 
        ¤¤  L'heure de l'opéra: Carmen : lundi 7 à minuit 20  (France3)
Redif.
 
 
        ¤¤  Noé de Bizet et Halévy : dans la nuit de vendredi à samedi vers 2h15 du matin  (TF1)
Dir.: E. Calaf - Redif.
 
 
 
RADIO:
        
 
        ¤¤  Ottavia, restituita al trono de D. Scarlatti (Beaune, en direct) : samedi 5 à 21h  (FM)
A. Florio - Y. Auyanet; F. Mineccia; M. G. Schiavo; M. Ercolano...
 
 
        ¤¤  Mémoire retrouvée : Christa Ludwig : dimanche 6 à 15h02  (FM)
 
 
        ¤¤  Concert: cantates de Haendel (St-Michel en Thiérache, juin 08) : dimanche 6 à 20h  (FM)
Clori, Tirsi e Fileno ; Alpestre monte
F. Bonizzoni - R. Invernizzi; N. Rial; R. Basso
 
 
        ¤¤  Symphonie n° 4 de Malher (Pleyel, avril 08) : dimanche 6 à 21h30  (FM)
I. Fischer - M. Persson 
 
 
       ¤¤  Cosi' fan tutte de Mozart (Aix, en direct) : dimanche 6 à 21h30  (Radio Classique)
C. Rousset - S. Soloviy; J. Vuletic; F. Bjarnason; E. Crossley-Mercer; J. van Wanroij; W. Shimell
 
 
        ¤¤  Le matin des musiciens: Musiques en révolution : de lundi à vendredi à 9h05  (FM)
 
 
        ¤¤  Récital Soile Isokoski (Gaveau, juin 08) : lundi 7 à 10h02  (FM)
M. Viitasalo, piano - Programme Sibelius, Grieg, R. Strauss, Mozart.
 
 
        ¤¤  A portée de mots: avec B. Foccroulle : lundi 7 à 14h02  (FM) 
 
 
        ¤¤  Zaïde de Mozart (Aix, en direct) : lundi 7 à 22h  (Radio Classique)
L. Langrée - E. Lakhina; S. Panikkar; A. Walker; R. Thomas; M. Robinson
[voir article sur Bajablog]
 
 
       ¤¤  Don Quichotte de Massenet : dans la nuit de lundi à mardi à 1h du matin  (FM)
K. Kord - N. Ghiaurov; G. Bacquier; R. Crespin... [voir 'Vivace']
 
 
        ¤¤  Concert Haendel (Saintes, en direct) : jeudi 10 à 20h  (FM)
The ways of Zion do mourn; Dixit Dominus
D. Reuss - H. Blazikova; E. Rapp; A. Potter; M. Bennett; M. Lutze
 
 
        ¤¤  Le barbier de Séville de Rossini (Nancy, avril 08) : vendredi 11 à 20h  (FM)
P. Olmi - K. Deshayes; S. Droy; N. Smith; F. Leguérinel; C. Lepore; M. Lagrange...
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3 juillet 2008 4 03 /07 /juillet /2008 11:37
Falstaff de Verdi
Théâtre des Champs-Elysées
29 juin 2008  

Mario Martone, mise en scène
Sergio Tramonti, décors
Ursula Patzak, costumes
Pasquale Mari, lumières
 
Alessandro Corbelli, Falstaff
Anna Caterina Antonacci, Alice Ford
Francesco Meli, Fenton
Caitlin Hulcup, Meg Page
Amel Brahim-Djelloul, Nanetta
Federico Sacchi, Pistola
Marie-Nicole Lemieux, Mrs Quickly
Ludovic Tézier, Ford
Enrico Facini, Dr Cajus
Patrizio Saudelli, Bardolfo

Orchestre de Paris
Choeur du Théâtre des Champs-Élysées
Alain Altinoglu
, direction



Le début de cette matinée fut quelque peu flottant, car la représentation tardait à commencer, donc le public s’est impatienté de plus en plus bruyamment – et moi, peu à peu, je m’angoissais silencieusement (vous connaissez, vous aussi, le syndrome du jamais deux sans trois ?) – enfin on a envoyé un jeune homme malhabile nous faire une annonce embrouillée et finalement il fallait retenir ceci : Corbelli souffrait de maux de gorge, mais tenait tout de même à assurer cette dernière représentation et il demandait indulgence pour sa prestation vocale – soulagement immédiat – Mais oui, bien sûr ! toute l’indulgence du monde, monsieur Corbelli !

Ce n’était pas coquetterie de sa part que de demander cette annonce, car effectivement il ne pouvait pas aller dans les aigus et à deux ou trois reprises, la voix n’a pas suivi, mais l’interprétation de son Falstaff ne tenait pas à cela et vraiment merci à lui d’avoir assuré son rôle.



Licida nous a déjà tout dit et je ne puis qu’abonder dans son sens.
Moi non plus ce n’était pas par amour de l’œuvre que je m’étais déplacée ; je ne connaissais que la vidéo avec White en plus d’une expérience malheureuse d’un Falstaff sur scène qu’il fallait effacer et je dois reconnaître qu’elle le fut magnifiquement dimanche.

La grande surprise m’est venue de l’aspect sombre, inquiétant presque parfois de ce Falstaff et sans ricanement à l’arrière plan, si je puis dire. C’est vraiment cela qui m’a marquée ; ici, le drame vous tombe sur le nez à tout moment, le théâtre est partout et pas que dans le rire. Dans cette production la musique, le décor, la lumière, la mise en scène et le jeu des interprètes vont vraiment dans le même sens et ne donnent pas, selon moi, dans la truculence, ne louchent pas vers le burlesque, mais réussissent à saisir ce goût si particulier à la farce où l’on joue des mauvais tours et non des bons, un goût doucereux plus près du fiel que du sucre et où c’est le rire qui l’emporte bien sûr, parce qu’il serait trop dangereux de tomber à son tour dans le ridicule de ceux qui se prennent au sérieux.



Corbelli est un acteur remarquable. C’était la première fois que je le voyais sur scène, mais j’avais vu quelques vidéos et il me semble qu’il fait partie de ces acteurs qui font toujours l’effort d’aller vers un personnage et non de tirer le personnage à eux. Son interprétation est très intelligente et il dégage son rôle de toute superficialité, de toute facilité. Falstaff n’est pas un comique, mais un homme dépassé par la vie, hors du coup, pitoyable par bien des aspects, et même déplaisant par une forme de suffisance et de bêtise. Mais au fond, on ne sait jamais, grâce à l’interprétation riche et dramatique que l’on nous donne ici, si Falstaff a toujours été un fabulateur suffisant et ridicule ou si… ou si sul serio il a été un Don Juan. Le doute est permis, il me semble. Et l’on se souvient alors du vieux Casa édenté et quasi chauve parfois malmené par les domestiques ou de ce vieil homme obèse, soufflant et suant, qui s’appelait pourtant toujours Brando. Oui, le doute est permis. Ce dont on ne doute plus, c’est que le monde s’est transformé sans qu’il ait pu en suivre la marche. Il a beau tenter de se donner le change à lui-même et s’encourager à avancer, à suivre son chemin comme il le chante, il a été laissé au bord de la route et il n’ira nulle part. Son monde a passé. Le monde des pages n’est plus. Le monde des seigneurs, réels ou rêvés, non plus. Falstaff est d’un autre temps. Le temps de l’aristocratie est révolu, le temps des hommes d’honneur aussi (mais ça…), mais peut-être même aussi le temps des hommes, et ce n’est pas moi qui vous fais un beau couplet mais c’est Falstaff qui nous le dit, en le déplorant bien sûr, et c’est aussi la pièce qui nous le montre puisque en effet ici ce sont les femmes, bourgeoises, qui mènent la danse et quand on prend le soin de les habiller de vert (Meg), de blanc (Nannetta) et de rouge (Alice) n’en fait-on pas les porte-drapeau d’un monde nouveau et le noir de la veuve salue peut-être encore les rêves des premiers carbonari.



Pour ce qui est des chanteurs, voyez ce qu’en dit Licida, je pense effectivement la même chose et mes redites vous feraient bâiller.
Un mot d’agacement, tout de même envers Tézier, car je trouve vraiment dommage qu’il ne parvienne pas à évoluer dans son jeu. Certes il fait plutôt bien le jaloux, mais nous (enfin, je ne voudrais mouiller personne non plus…) nous étions en droit de penser que Ford tenait à sa femme et pas qu’à sa réputation, et lorsque Falstaff boit le bouillon on pouvait légitimement s’attendre à ce que sa joie ne soit pas simplement toute contenue dans le fait de n’être pas un cornard, mais qu’il s’y mêle aussi un peu de sentiment et qu’un geste tendre, si ce n’est amoureux, envers cette épouse somme toute fidèle et vertueuse ne serait pas déplacé. Ben, non ; raide comme la justice le Ford, mais content de lui et donnant le bras à Alice comme un père qui conduirait sa fille à l’autel. Elle a beau se faire douce et proche, il ne répond pas par un jeu complice (et on se souvient subitement que Chorèbe ne savait déjà pas comment tenir Cassandre). Dommage, dommage. Certes, cette vision du personnage pourrait sans doute se défendre, mais on ne m’empêchera pas de penser qu’elle est un peu courte et manque d’esprit… et comme madame Ford n’en manque pas je ne lui prédis pas que de beaux jours.

Marie-Nicole Lemieux s’amuse pour nous amuser et c’est tant mieux, parce que ça marche impeccablement. A noter tout de même qu’elle jouait avec un bras en écharpe et qu’elle ne s’est pas économisée pour autant.

Meg est bien la sacrifiée du quatuor. Il me semble que Caitlin Hulcup n’a pas une seule scène qui lui permettrait de mener le jeu (c’est écrit comme ça, je pense), de prendre le pouvoir au moins pour un instant, et comme ses comparses ont toutes les trois un physique dont elles savent jouer et que le sien ne semble que banal elle ne parvient pas à s’imposer. Et la mise en scène ne lui accole non plus jamais de complices ce qui pourrait l’aider un peu à se mettre en valeur (par exemple quand Quickly vient raconter son entrevue avec Falstaff, Alice est assise sur un canapé auprès d’elle et toutes deux peuvent facilement se regarder, se toucher brièvement pour arrêter ou relancer le discours et faire passer l’entente et la complicité, mais Meg, elle, est reléguée dans un fauteuil en face des deux autres, le regard est certes possible mais pas l’échange direct), donc Caitlin Hulcup est complètement effacée et le plus franchement du monde, je ne sais pas si je la reconnaîtrais après l’avoir vue dans cette production. D’ailleurs le finale me paraît assez symptomatique : elle est assise au milieu de la scène, mais seule, alors que les autres forment de petits groupes et… on l’oublie tout à fait.

Amel Brahim-Djelloul tient bien son rôle. Elle est jeune, jolie, joue les amoureuses, les boudeuses, les contentes, et voilà ! Et en ce qui concerne sa scène de la balançoire qu’évoque Licida, je dois dire que n’ai pas trouvé l’effet particulièrement réussi ; je n’ai rien contre l’idée, mais la mise en place m’a semblé quand même plutôt laborieuse (pourquoi diable ne pas s’être servi de la structure à étages pour la faire descendre déjà installée et perchée sur sa balançoire ?…) et comme Falstaff est à ce moment-là face contre terre, ceux qui la voient ainsi sont ceux qui l’y ont installée… mouais. Heureusement, les bonnes idées ne manquent vraiment pas dans cette mise en scène (la terrasse, par exemple, au début du III ou les masques antiques, bien sûr) et la balançoire ne fait que passer.

Puisque c’est quand même l’image qui me restera longtemps, je me suis gardée la biche pour la fin :-) « Anna Caterina Antonacci est fabuleuse en Alice Ford », dixit Lici. Eh bien, je ne prétendrai pas le contraire. Vous pouvez sans crainte valider la liste des qualités qu’il donne et ajouter peut-être encore quelques notions supplémentaires comme jouer la pimbêche ou savoir être rosse et… drôle. Simplement drôle. Ce que Licida appelle un sautillement innocent est l’entrée en scène d’Antonacci dans la seconde partie du III. Puisque Falstaff est alors le Chasseur Noir coiffé de beaux bois, Alice devient tout naturellement la belle biche gambadant alentour histoire d’allumer complètement le dix cors tout en gardant l’air modeste malgré les œillades nécessaires pour se rendre compte de l’effet produit. Irrésistible. L’effet est immédiat, sur l’animal évidemment, mais aussi sur la salle qui littéralement bruisse alors de contentement. Mais le grand art arrive. La biche est poseuse, savez-vous. Elle va donc, l’air détaché, s’allonger dans la prairie. Je ne sais pas trop comment Antonacci s’y prend, mais après un tour sur elle-même elle ‘descend’ pour s’asseoir par terre et allonger ses jambes avec une grâce infinie, le buste un peu de trois-quarts, le port altier, le mufle frais cherchant le vent : on voit bel et bien la biche au repos et cependant sur ses gardes allongée dans la prairie. Falstaff n’en peut plus ; le public est complètement ravi. Mais il manquait encore un détail au tableau : l’oreille frémissante ! Se tournant légèrement vers le public, parce qu’elle aurait trop les manières d’une effrontée en fixant Falstaff et notre biche sait se tenir, Antonacci place au-dessus de sa tête une main aux doigts joints qu’elle agite dans une sorte de tremblement et ce, le sourcil légèrement relevé. La salle ne bruisse plus, elle explose de bonheur. Si ce n’est pas jouer avec le public, je ne sais pas ce que c’est… peut-être une tragédienne qui s’amuse à nous faire sentir qu’elle aurait très bien pu décrocher un premier prix de comédie.



Franche ovation du public pour toute l’équipe ; bien méritée !


NB : Martone et Antonacci avaient déjà travaillé ensemble pour une production de Cosi’

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27 juin 2008 5 27 /06 /juin /2008 23:16

Falstaff de Verdi
Théâtre des Champs-Elysées
27 juin 2008   

Mario Martone, mise en scène
Sergio Tramonti, décors
Ursula Patzak, costumes
Pasquale Mari, lumières
 
Alessandro Corbelli, Falstaff
Anna Caterina Antonacci, Alice Ford
Francesco Meli, Fenton
Caitlin Hulcup, Meg Page
Amel Brahim-Djelloul, Nanetta
Federico Sacchi, Pistola
Marie-Nicole Lemieux, Mrs Quickly
Ludovic Tézier, Ford
Enrico Facini, Dr Cajus
Patrizio Saudelli, Bardolfo

Orchestre de Paris
Choeur du Théâtre des Champs-Élysées
Alain Altinoglu, direction



Ah le charme de découvrir enfin tous les mérites d'une oeuvre à laquelle on se croyait insensible! Je dois avouer que l'écoute adolescente du célèbre disque de Karajan avec Gobbi et Schwarzkopf ne m'avait pas transporté au dela de l'estime pour la dernière oeuvre de Verdi en forme d'éclat de rire, un éloge final de la vie et blablabla. Et ce soir je viens de goûter tous les délices de ce théâtre et de cette musique lourdement sautillante. Une chose m'a en effet saisi: l'alternance de phrases graves et de phrases légères; sans forcément convoquer l'air de la jalousie de Ford, à bien des moments on a le sentiment que l'orchestre nous joue Don Carlos pendant quelques secondes avant de retrouver les fins traits d'archers et la comédie pastorale. C'est tout le charme de cette oeuvre de méler ainsi puissance lyrique dévastatrice et rire allègre; c'est une comédie qui, entrainée par un orchestre débordant et parfois menaçant, vire à la farce.



Autant dire tout de suite que j'ai donc beaucoup aimé. La mise-en-scène de Mario Martone m'a semblé honnête toute la première partie, rien de révolutionnaire,  une scénographie efficace faite de quelques meubles et d'échafaudages communiquant par des escaliers en fond de scène et qui permettent avec astuce de faire surgir les personnages de façon changeante et simultanée. Mais bon, rien de fabuleux, je saluais juste la direction d'acteurs alerte qui donnait une impression de naturel qui, même si elle n'impressionne jamais, est bien la chose la plus difficile à rendre, surtout pour une comédie où la convention ne saurait excuser les boursouflures tragiques du drame lyrique.
Heureusement la seconde partie signa la réussite de cette mise-en-scène: le rideau s'ouvre sur Falstaff emmitoufflé dans une couverture devant des draps et du linge séchant sur un fil; les complotteurs apparaissent sur l'echafaudage dans la pénombre et épient entre les draps. Ce qui pourrait passer pour un stéréotype de la comedia dell'Arte s'avère ici très efficace et juste pour rendre crédible la présence dissimulée de tout ce monde sur une si petite scène. Le dernier tableau découvre une superbe toile de scène derrière l'echafaudage représentant le chêne en bleu, rouge et vert, toile féérique, touche shakespearienne dans cet univers du XIXème siècle finissant voulu par le metteur-en-scène. Un gros projecteur posé à l'avant scène vient souligner la mise en abyme. Les personnages fabuleux apparaissent alors de tous cotés sur l'échafaudage envahissant la scène instaténément comme par magie, revêtus de toges et de masques empruntés au théâtre antique, superbe idée pour traduire la séverité grimaçante de cette farce que l'on retrouve dans la musique. Et Nanetta de chanter son célèbre air debout sur une balançoire oscillant au dessus de Falstaff chatouillé par les êtres imaginaires; belle idée là aussi pour cet air tout en apesanteur, idée que Serban avait d'ailleurs déjà eu pour le premier air de Lucia. Et le final vient synthétiser toute l'histoire dans un décor redevenu réaliste devant ce projecteur que Falstaff franchit pour adresser sa dernière phrase au public, lui aussi dupé, mais par l'illusion comique.



Evidemment cette belle, intelligente et fine mise-en-scène ne serait rien sans les talents d'acteurs de l'équipe de chanteurs. Patrizio Saudelli est un Bardolfo bouffe à souhait, tout comme le Dr Cajus d'Enrico Facini ou le Pistola de Federico Sacchi à la voix presque trop belle pour un rôle censé verser dans le ridicule. En Fenton Francesco Meli est très bon dans les scènes à plusieurs, mais son air du dernier acte le trouve inutilement dégoulinant, chantant trop fort un air qui devrait être tout en délicate séduction, du coup il tombe dans la caricature du ténor chantant une berceuse à reveiller les morts, dommage. La Meg de Caitlin Hulcup est un peu trop effacée dans le brillant quatuor féminin, mais, à sa décharge, la partition ne l'aide guère à se faire remarquer.
La Nanetta d'Amel Brahim-Djelloul est un peu sèche dans la fraicheur, trop tendue pour sonner juvénile, mais pour son dernier air chanté sur un fil et pour sa clarté vocale on lui pardonne aisément ce manque de naturel dans le ton. La Mrs Quickly de Marie-Nicole Lemieux est truculante, usant de graves impressionnants et fortement poitrinés, dans un génie comique qui tire sur la caricature avec bonheur, on ressent toute la joie enfantine qu'elle a de jouer les commères, le tour de force étant clairement ici de doser savamment sa voix pour que la force comique et la puissance vocale du personnage aillent toujours de paire sans jamais s'imposer au détriment de l'autre.
Cet équilibre Ludovic Tézier n'a pas sur le trouver pour Ford: la voix est somptueuse, l'air de jalousie ravageur, mais on a du mal à croire que ce personnage soit assez joueur pour faire une farce à Falstaff tant il respire la sévérité, ce Ford là ressemble facheusement à un Otello pour le coup et l'acceptation du revirement final sonne fausse.
Anna Caterina Antonacci est fabuleuse en Alice Ford, tout y est: la classe, l'esprit, la veine comique, la légereté, la séduction, l'élégance, l'italiennita; quel bonheur de la voir sautiller innocemment en feignant  l'amour pour Falstaff au début de la dernière scène; vocalement le rôle ne lui  pose pas de problème, même si l'aigu est assez tendu et crillard quand il est tenu, mais ce n'est pas gênant car ils sont écrits dans les ensembles et passent donc assez bien.
Enfin le Falstaff d'Alessandro Corbelli est merveilleux, jouant intelligemment sur la rustrerie de son personnage sans en faire des tonnes; caricaturer ce personnage serait rendre incompréhensible son passé et son attitude finale, Falstaff n'est pas qu'un gros porc ivrogne et libidineux comme le font croire les insultes des commères, il est bien plus attachant et Corbelli a su brillamment rendre ce caractère comique et sympathique jusque dans sa grossiereté.




Un dernier mot pour l'Orchestre de Paris sous la direction d'Alain Altinoglu qui n'est pas pour rien dans la réussite de ce spectacle: certes on pourrait souhaiter plus de couleur et un son moins "militaire", mais son soucis permanent de soutenir les chanteurs sans perdre en allant et en rythme est plus que payant; il sait par ailleurs très bien rendre les contrastes dont cette musique est emplie.



Bref la dernière a lieu dimanche et je ne saurai trop vous recommander d'y aller. Sinon vous pouvez toujours vous consoler avec la petite vidéo de la générale proposée sur la page d'accueil du site internet du Théâtre des Champs-Elysées (cliquez sur voir en bas à droite - dépêchez vous, elle ne restera plus là très longtemps!).


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27 juin 2008 5 27 /06 /juin /2008 23:13
Semaine du 28 juin au 4 juillet :
 
 
 
TELEVISION:
                       
 
        ¤¤  Gergiev dirige Verdi, Rimski-Korsakov et Stravinski (St-Pétersbourg, 2006) : dimanche 29 à 19h  (ARTE)
avec notamment O. Borodina
 
 
        ¤¤  L'heure de l'opéra: Maria Callas, toujours vivante : lundi 30 à minuit 20  (France3)
... le retour.
 
 
        ¤¤  Le sanglot des anges de J. Otmezguine (4/4, 2008) : mercredi 2 à 20h55  (France2)
[... ouf! ...]
 
 
 
RADIO:
        
 
        ¤¤  Dans la cour des grands: concours Reine Elisabeth + master-class J. Van Dam : samedi 28 à 13h07  (FM)
                       
 
        ¤¤  Les Capulets et les Montaigus de Bellini (ONP, juin 08) : samedi 28 à 19h30  (FM)
E. Pido - J. DiDonato; A. Netrebko...
 
 
        ¤¤  Les greniers de la mémoire: Rita Streich : dimanche 29 à 11h  (FM)
 
 
        ¤¤  Par les rues, par les chemins: Milan au XVIIIe (2) : dimanche 29 à 14h  (FM)
Mozart père et fils.
 
 
        ¤¤  Histoires de musiques:  la nuit, l'été, le songe, le silence et l'aurore : dimanche 29 à 19h07  (FM)
Purcell, Mendelssohn, Britten...
 
 
        ¤¤  Concert des Talens Lyriques (Aix, en direct) : dimanche 29 à 20h  (Radio Classique)
Campra: Requiem / Rameau: Quam dilecta / M.A. Charpentier: Symphonie pour un reposoir
C. Rousset - C. Scheen; S. Haller; E. Gonzalez-Toro; R. Getchell; M. Brook
 
 
        ¤¤  Lady Macbeth de Mzensk de Chostakovitch : dans la nuit de dimanche à lundi à 1h du matin  (FM)
Rostropovitch - G. Vichnievskaïa; N. Gedda; D. Petkov; R. Tear... [voir 'Vivace']
 
 
        ¤¤  Pelléas et Mélissande de Debussy : dans la nuit de lundi à mardi à 1h du matin  (FM)
Haitink - A.S. von Otter  [voir 'Vivace']
 
 
        ¤¤  Tout arrive: en direct d'Aix : mardi 1er à 12h02  (France Culture)
Pour Cosi' et Zaïde
 
 
        ¤¤  Soirée spéciale Aix-en-Provence : mardi 1er à 20h  (Radio Classique)
Les grandes figures du festival: Rattle, Jacobs, Rousset...
 
 
        ¤¤  L'oreille d'un sourd: avec P. Dusapin : mardi 1er à 21h  (France Culture)
Pour son opéra Passion
 
 
        ¤¤  La Clémence de Titus de Mozart : dans la nuit de mardi à mercredi à 1h du matin  (FM)
I. Kertesz - W. Kren; T. Berganza; M. Casula; L. Popp; B. Fassbaender; T. Franc  [voir 'Vivace']
 
 
        ¤¤  Passion de P. Dusapin (Aix, en direct) : mercredi 2 à 20h  (Radio Classique)
R. Hayrabedian - B. Hawnnigan; G. Nigl - U. Wiget
 
 
        ¤¤  La femme sans ombre de R. Strauss (Vienne, 1977) : dans la nuit de mercredi à jeudi à 1h du matin  (FM)
Böhm - J. King; L. Rysanek; R. Hesse; P. Wimberger; L. Rysanek; E. Aichberger; G. John; W. Berry; B. Nilsson... [voir 'Vivace']
 
 
        ¤¤  Récital Kim Criswell (Opéra-Comique, juin 08) : vendredi 4 à 10h02  (FM)
W. Marshall, piano - Programme Bernstein, Weill, Porter, Gershwin.
 
 
        ¤¤  Siegfried de Wagner (Aix, en direct) : vendredi 4 à 17h30  (Radio Classique)
S. Rattle - B. Heppner; K. Dalayman; B. Ulrich; W. White; D. Duesing; A. Reiter; A. Larsson; M. Erdmann

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22 juin 2008 7 22 /06 /juin /2008 14:36
[+ une rareté: pas de son, pas d'acteurs, pas de dessins: Les aventures du prince Ahmed de Lotte Reiniger, mardi 24 sur France2 vers minuit 45...]
 
 
________________________________
 
Semaine du 21 au 27 juin :
 
 
 
TELEVISION:
                       
 
        ¤¤  Rigoletto de Verdi (Dresde, en direct) : samedi 21 à 21h  (ARTE)
F. Luisi / N. Lehnhoff - J.D. Florez; Z. Lucic; D. Damrau...
 
 
        ¤¤  Carmina Burana dans la ville : dans la nuit de samedi à dimanche vers 3h20 du matin  (France3)
Orchestre de l'Académie de musique
 
 
        ¤¤  Concert: Les plus grands airs d'opéra (aux Invalides) : dimanche 22 à 15h  (France3)
Orchestre et Choeur de la Garde républicaine.
 
 
        ¤¤  Le sanglot des anges de J. Otmezguine (3/4, 2008) : mercredi 25 à 20h55  (France2)
[... oui, je ne vous en épargnerai aucun...]
 
 
 
RADIO:
        
 
        ¤¤  Dans la cour des grands: 'Concert Déclic' (Petit-Palais, juin 08) : samedi 21 à 13h07  (FM)
Nathalie Gaudefroy, soprano; A. Piboule, piano.
 
 
        ¤¤  Place de la musique: avec P. Jaroussky : samedi 21 à 15h  (Radio Classique)
 
 
        ¤¤  Jusqu'à la lune et retour: Isabelle Aboulker : samedi 21 à 18h30  (France Culture)
 
 
        ¤¤  Fête de la musique (Orsay et Palais du Luxembourg) : samedi 21 à 20h  (FM)
Franck: Psyché - Puis concert Poulenc / Pierné / Rosenthal /Absil / Jourdain Maîtrise de RF - Puis programme Gounod / Debussy / Fauré / Chabrier / Massenet
 
 
        ¤¤  Les greniers de la mémoire: Teresa Berganza : dimanche 22 à 11h  (FM)
 
 
        ¤¤  Par les rues, par les chemins: Milan au XVIIIe (1) : dimanche 22 à 14h  (FM)
De 1730 à 1770: le règne de Sammartini.
 
 
        ¤¤  Histoires de musiques:  Feuilleton Falstaff (7/7) : dimanche 22 à 19h07  (FM)
Le monde entier est une farce - Karajan (Salzbourg, 1957)
 
 
        ¤¤  Le matin des musiciens: Une déesse jalouse ou les fureurs de Junon : de lundi à vendredi à 9h05  (FM)
 
 
        ¤¤  Com que voz de Gervasoni (Châtelet, juin 08) : lundi 23 à 20h  (FM)
F. Ollu / C. Branco - F. Wörner - T. Goepfer
 
 
        ¤¤  Sur la route d'Aix : R. Jacobs : mercredi 25 à 21h  (Radio Classique)   
 
 
        ¤¤  Concert Caplet / Brahms / Debussy (Munich, juin 07) : jeudi 26 à 10h02  (FM)
M. Jansons - Atsuko Suzuki - Barenboïm, piano.
 
 
        ¤¤  Concert Vaughan Willams / Orff (Bordeaux, juin 08) : jeudi 26 à 16h  (FM)
K. Ryan - O. Pasichnyk; M. Tucker; V. Rusanen...
 
 
        ¤¤  La vie baroque: Andreas Scholl : jeudi 26 à 21h  (Radio Classique)
 
 
        ¤¤  Concert Chostakovitch (TCE, décembre 06) : vendredi 27 à 10h02  (FM)
B. Haikink - Matthias Goerne
 
 
        ¤¤  Hees bien raisonnable?: avec Roberto Alagna : vendredi 27 à 19h15
 
 
        ¤¤  Le rouet d'or de Dvorak / Das Lied von der Erde de Malher (Munich, en direct) : vendredi 27 à 20h  (FM)
D. Harding - M. Schade; C. Gerhaher
 
 
        ¤¤  Le goût des autres: La Bohème de Puccini : vendredi 27 à 21h  (Radio Classique)

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15 juin 2008 7 15 /06 /juin /2008 00:57
Handel
Giulio Cesare
Salle Pleyel
14 juin 2008
 
Giulio Cesare: Lawrence Zazzo
Cleopatra: Sandrine Piau
Sesto: Malena Ernman
Tolomeo: Christophe Dumaux
Cornelia: Kristina Hammarström
Achilla: Nicolas Rivenq
Nireno: Andrew Radley
Curio: Andrew Davies

Freiburger Barockorchester
René Jacobs



Giulio Cesare n'est franchement pas mon opéra favori de Handel, comme je le disais déjà à propos de la production du Théâtre des Champs Elysées il y a deux ans, j'en trouve la dramaturgie hasardeuse et déplore l'abondance d'airs (brillants ou pas) qui n'ont rien à voir avec le drame et qui cotoient des morceaux parmi les meilleurs de son compositeur. Donc en arrivant dans la salle et en feuilletant la distribution, quel ne fut pas mon effroi en voyant que cela allait durer 4 heures! Ils vont nous le faire en entier, le moindre récitatif de Curio y sera!  Bon en fait, entre le début retardé, l'entracte et les longs applaudissements il y a eu 3 heures de musique, mais ces trois heures là ne m'ont pas ennuyé un seul instant, détaillons donc le miracle de cette soirée.

Tout d'abord un mot sur les coupures: étrange idée de nous priver de "Qual torrente", "La giustizia ha gia sull'arco" ou "Se, spietata, il tuo rigore" mais de nous laisser " Cessa omai di sospirare" (bon ok faut bien que cette pauvre Cornelia ait quelque chose à chanter), le deuxième air d'Achilla dont j'ai déjà oublié le titre, "Non e si vago e bello" ou ce récitatif accompagné de Tolomeo au II sans intérêt. M'enfin ce n'est pas grand chose à coté de ce qui aurait pu être une version de référence, n'était le choix de distribuer Lawrence Zazzo en Cesare.

J'étais venu à ce concert pour les trois dames que j'adore, pour l'orchestre que je chéris encore plus depuis l'Iphigénie à Garnier et surtout pour entendre ce que  René Jacobs ferait de cette partition 15 ans après son disque historique. Je pensais naïvement qu'après le disque dirigé par Marc Minkowski, on ne pouvait pas aller plus loin en terme de richesse orchestrale pour cette oeuvre, je me trompais.
Les Freiburger Barockorchester furent ce soir proprement époustouflants! Jamais je n'avais entendu cette musique jouée de façon aussi dense et prenante; évidemment c'est le grand René que l'on doit saluer ici: sa direction est d'une fertilité, d'une imagination, d'une inventivité fabuleuses. Quels progrès depuis le disque! Alors il évidemment il y a le fait que ce spectacle a d'abord été donné mis-en-scène à Amsterdam, donc le tout est bien rodé, mais il y a avant tout, en amont, un travail de relecture de la partition passionnant. Pour s'en convaincre il suffit de regarder la basse continue: deux clavecins, un orgue, deux luths, une guitare et une viole!! Tout de suite les récitatifs prennent une saveur inconnue.
Saluons donc le soin méticuleux apporté à chaque note: jamais "Se in fiorito" n'avait pour moi autant respiré la franche rusticité, "L'aura che spira" sonné si haletant, jamais les liaisons entre récitatifs et airs ne m'avaient parues si naturelles, presque imperceptibles, jamais. Et comment ne pas remarquer le brillant jeu d'echo entre les deux violons se rapprochant depuis l'arriere scène et alternant tour à tour avec la voix du chanteur dans le "Se in fiorito" spatialisant ainsi cette musique de façon parfaite, le spectateur se laissant surprendre par les traits de violon, les cherchant du regard, exactement comme Cesare avec le chant des oiseaux. Enfin il faut mentionner ici un effet "3D" spécifique à Jacobs dont il faisait déjà usage dans Le Messie et que je n'ai jamais entendu ailleurs: cette façon à la reprise, de jouer piano une phrase et forte celle qui suit immédiatement, comme si la partition enflait, semble surgir dans le da capo. Je pourrai parler encore longtemps du dosage intelligent des silences, des attaque surprenantes, des cadences parfaitement écrites... Une telle perfection orchestrale m'évoque sans que je sache bien pourquoi, ce que disait Arasse à propos de Vermeer, "la précision du flou", il y a de ça ici, tant tout semble précis sans jamais sonner pointu ou étriqué.

Irriguant toute la soirée cet orchestre a galvanisé les chanteurs, leur offrant un écrin idéal. Commençons par le sujet qui fache: Lawrence Zazzo. Comme pour son Pompeo à Pleyel, je le repête, j'adore ce que fait ce chanteur dans le repertoire élégiaque. Son Ottone dans l'Agrippina de Handel, son Gualtiero dans la Griselda de Scarlatti ou même son Amor celesto chez Caldara sont fabuleux. Il jouit d'un aigu rayonnant et large (très rare pour un contre-ténor), d'une projection splendide et d'un timbre moelleux, delectable. Mais bordel que l'on arrête de le faire passer pour un héros viril, c'est tout le contraire!! Depuis un moment il enchaine les rôles de castrat héroïque qu'il est incapable d'assumer vocalement ne se donnant pas la peine de faire tous les graves et qui ne lui vont pas théâtralement, ce timbre manquant clairement de testostérone (et les castrats en avaient: je vous rappelle que cette hormone n'est pas uniquement sécretée dans les testicules). Du coup tous les airs héroïques tombent à l'eau puisqu'il ne chante que la moitié de la partition: certes il a fait des progrès et savonne bien moins les vocalises qu'auparavant, mais quel est l'intérêt de chanter "Empio diro tu sei" avec deux notes graves dont une inaudible?! Dans le reste de la soirée nous n'auront droit qu'à deux graves supplémentaires, soit en tout et pour tout 4 notes graves... stupide! Et de fait la coupure du "Qual torrente" s'explique: ce torrent là n'aurait pas pu arriver "tutto a terra". Et même si dans le "No e si vago e bello" ou surtout le "Se in fiorito" et le "Aure deh per pieta" ses aigus sont radieux, ce n'est pas Giulio Cesare que l'on a devant nous, mais un personnage angélique un peu benêt non identifié dans cette partition. (Sinon pour continuer dans le registre comique, j'ai appris qu'il allait bientot chanter le rôle-titre de Radamisto: PTDR, y a pas d'autre mot!) Quand je pense qu'à Amsterdam ils ont eu droit à Marijana Mijanovic!

D'autant qu'à coté de lui Christophe Dumaux est passionnant: je n'avais retenu de son Tolomeo à Glyndenbourne qu'un bon acteur mais une voix sans grand intérêt, idem pour son Eustazio au disque. Quels progrès prodigieux il a accompli! Non seulement il brule les planches avec son personnage d'hystéro-colérique, mais cette voix percutante pleine de trémulations est passionnante, et bordel de Dieu, quels graves!! Et pas seulement sur une note pendant les récitatifs, mais des phrases entières dans les airs, à coté d'aigus triomphants, c'est remarquable. Christophe Dumaux est entré ce soir dans mon top des contre-ténors capables de chanter des rôles héroïques (à savoir Cencic, Fagioli et Mehta) même s'il a encore des progrès à accomplir en terme d'homogénéité des registres. Du coup je serais curieux d'entendre son Orlando, surtout le "Cielo se tu consenti" dans lequel il doit être fabuleux. La surprise de la soirée! Pour en savoir plus sur lui, voyez son interview sur ForumOpera. Dorénavant je vais le suivre de prêt celui là! Ah oui et si tu nous lis Christophe, j'adore ta chemise, voilà c'est dit!



Finissons en avec les hommes en saluant les bonnes prestations d'Andrew Davies et d'Andrew Radley, bons acteurs; et surtout en louant le luxueux Achilla de Nicolas Rivenq, qui n'a plus les graves d'autrefois mais dont le style est irréprochable et qui réussi à rendre émouvant son personnage secondaire, c'était la premiere fois que j'avais de la compassion pour la simplicité bonhomme d'Achilla, un conception vraiment interessante et différente de celle, impressionnante, de brute libidinale dessinée par Christopher Maltman (DVD Glyndebourne).


A ces dames à présent: Kristina Hammarström m'avait beaucoup plus en Teseo et en Irene, ici plus que jamais elle est sous employée. Toute la gravité de son élocution et la douceur de son émission ne réussissent pas à rendre sa Cornelia marquante, tant ce rôle ingrat n'est payant que pour une chanteuse au timbre qui sort de l'ordinaire (Bardon, Hellekant). Passé le très beau "Priva son d'ogni conforto" et le "Son nata a lagrimar", il n'y a plus rien d'interessant à chanter. Attendons donc de revoir Kristina Hammarström dans des rôles plus à sa mesure.

Malena Ernman est décidemment bien trop rare en France! Depuis son Néron historique, rien d'autre qu'un Lichas à Garnier, heureusement on la verra en Dido la saison prochaine. Son Sesto est boulversant. Etrangement elle a choisit de chanter le rôle de façon très grave, alors que ce registre est assez étouffé chez elle (mais peut-être était-ce du à cette lanière qui lui compressait le ventre?), surtout en comparaison de ses aigus fulgurants. Et pourtant cela fonctionne: son Sesto est impetueux, écrasant ses doutes et sa timidité adolescente sous son devoir de piété filiale; ces graves concassés sont ceux d'un adolescent qui veut faire croire qu'il est un adulte, qu'il est digne de son père, conviction hallucinée que le regard intense de Malena Ernman rend de façon poignante. Si le "Svegliatevi nel core" a pu paraitre gêné dans ses moments de vaillance, le "Cara speme" a, comme rarement, sonné incarné, derniers echos de l'enfance pour celui que les évenements ont précipité hors de l'adolescence; mais c'est surtout "L'angue offeso" qui fut boulversant, accompagnée par un orchestre superlatif, elle a parfaitement traduit le rapprochement avec cet animal humble à la puissance rampante qui n'a de repos qu'après la vengeance; enfin 'L'aure che spira" l'a trouvée fulminante. Avec une voix moins chatoyante qu'une Anna Bonitatibus, elle a donc réussi à imposer un personnage boulversant et crédible. Voilà par ailleurs son terrible "Come nembo" de l'Agripina de Handel.





Enfin la princesse de la soirée ce fut Sandrine Piau: on devinait déjà sa Cléopatre enthousiasmante en écoutant l'air gravé dans son disque Opera Seria dirigé par Christophe Rousset, le pronostic était bon. Certes il n'y a toujours pas de trille au programme, certes le rôle est trop grave pour elle, mais on ne peut que rendre les armes devant une telle finesse, une telle précision d'exécution qui ne serait que froide machinerie sans cet art de l'animation du mot, qui dessine un personnage d'autant plus crédible qu'il n'est jamais caricatural et surtout qu'il est cohérent: de la folle mais pas cruche Lydia à la douloureuse Cléopatre, il n'y a qu'un pas et l'on peut toujours voire l'une à travers l'autre jusqu'à la résolution de "Da tempeste" où ses aigus jouissifs ont miroités dans tous les sens. Sans oublier que le show était aussi visuel: Lydia en robe rouge, Cleopatra en robe noire échancrée sur la jambe droite et un final en robe de dentelle blanche, quelle allure! Et quelles oeillades pendant les récitatifs!



Bref une soirée mémorable, qui aurait pu être capitale avec un véritable Cesare à sa tête. Si cet opéra était donné avec autant de soin à chaque fois, il serait certainement dans mes favoris. Mon seul regret est de constater que Jacobs consacre presque uniquement son temps à des tubes: la trilogie Da Ponte, Giulio Cesare, Tancredi, bientôt Idomeneo (avec Croft ça je l'attends avec impatience), on parle aussi d'un Barbier de Séville (non pitié!), seule La Patience de Socrate faisait figure de rareté. Pourtant je donnerai cher pour qu'il dirige du Hasse ou du Handel délaissé (Partenope!)...
 Et pour finir, une photo étonnante et une vidéo délirante de Malena!






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