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Psychologie

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Il catalogo è questo

2 juin 2007 6 02 /06 /juin /2007 15:46

j'en ai la preuve formelle... et elle a de très belles cuisses!

 

 

Et ne venez pas me dire que la Colbran n'a pas chanté Rosina: derrière cette Rosina se cache Armida!

 

Nb: ne me faites pas l'affront de me demander qui c'est! ;)

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5 janvier 2007 5 05 /01 /janvier /2007 23:21

Vivica Genaux, voix hors normes

Le timbre de Vivica Genaux est immédiatement reconnaissable, même si l’émission n’est peut-être pas particulièrement orthodoxe, sonnant un peu engorgée. La technique de vocalisation avec ses lèvres très mobiles est aussi critiquée ; je m’en fiche : ça fonctionne. Ce n’est donc certainement une voix pour tous, mais j’avoue que son timbre et sa technique fabuleuse me parlent immédiatement.

L’étrangeté et les couleurs androgynes de sa voix, les graves appuyés, les aigus sopranisants, créent des effets contrastés qui captent mon attention et évoquent plus justement que n’importe quel falsettiste le trouble que le castrat soprano pouvait susciter. D’autant que sa virtuosité incroyable, à présent parfaitement polie et achevée, ainsi qu’une tessiture extrêmement étendue, lui permettent de rendre justice aux pages les plus redoutables de l’âge d’or du bel canto.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Haendel et Hasse 

La sortie de l’album baroque de Vivica Genaux a longtemps été retardée, tandis que le programme du disque ainsi que de son concert au TCE changeait plusieurs fois.

Ceux que ses prestations avaient intéressés et séduits dans le désormais fameux disque « Farinelli » avec Jacobs, ainsi que ses performances plus maîtrisées encore dans le Bajazet de Vivaldi, attendaient ces retrouvailles avec impatience ; les chanceux qui possèdent un enregistrement d’un de ses concerts de la serenata de Hasse Marc’Antonio e Cleopatra étaient sans doute plus curieux encore.

Il faut dire qu’autant ses interprétations de Haendel paraissent génériques et uniquement virtuoses (dans des tessitures sans doute aussi inadaptées car souvent trop graves), autant ses rencontres avec la musique de Hasse, et plus généralement le style « galant » napolitain de Porpora, Giacommelli ou Broschi semble lui être naturel, et respirer avec une élégance et une virtuosité sidérante et émouvante. Genaux le confiait d’ailleurs elle-même fort lucidement et honnêtement dans une très intéressante entrevue sur Operadatabase.

Pourquoi ne pas avoir alors conçu un programme entièrement dédié à Hasse et à ses épigones ? pas assez vendeur… au moins un nom connu et reconnu à l’affiche, s’il vous plait ! Genaux n’est pas encore une Bartoli capable de réunir des salles entières avec un programme d’inédits de Salieri. De fait, les places de son concert parisien ont eu toutes les peines du monde à s’écouler, et ce malgré les premiers succès glanés dans la capitale en Isabella (Garnier) et au TCE même dans Cenerentola.


 

 

 

 

 

 

 

Le disque 

 

Deux extraits de l’Orlando de 1733 écrit pour Senesino ouvrent le programme. L’orchestre, mêlant instruments anciens et récents, peine à accompagner les rodomontades du personnage dans « Fammi combattere » avec toute la fougue requise. Dans l’ensemble, la direction de Labadie reste juste propre, en place, sage. Genaux elle-même débute assez placidement, alignant avec goût et facilité les difficiles vocalises. Le da capo révèle néanmoins une exubérance que l’on retrouve tout au long du disque, ici aussi riches, virtuoses et échevelées que celles de Podles sur son album Haendel, mais bien plus à leur place stylistiquement. La voix est moins celle du héros contralto, en revanche.

Ce manque de poids naturel gêne un peu dans la scène de folie, où le déficit d’engagement de l’orchestre pèse encore. Tout est pourtant ciselé, pesé et travaillé dans l’interprétation, mais cela intéresse plus que ça ne passionne.

« Sta nell’ircana » est incontestablement une grande réussite. C’est la seule page de haute virtuosité rutilante de l’album, et même si les cors sont trop absents et ne dialoguent pas vraiment avec la voix, Genaux est tellement à son aise dans cette écriture (très galante, d’ailleurs, de style) ornée et jubilatoire, avec une reprise fulgurante d’agilité et de classe, que là seulement naît l’émotion : au hasard d’un trait inattendu on attrape la chair de poule.

Aimable et élégante, la cantate « Splende l’alba in oriente », déjà connue, n’est pas la plus dramatique ni la plus passionnante des cantates de Haendel. La mezzo en donne une interprétation tout à fait probante, mais ce style ne lui convient pas tellement plus que Rinaldo ou même Orlando.

Les premières mesures de Hasse, dans la suite du programme, sont empreintes de ce style immédiatement reconnaissable, si « sensible » et élégant. Trois airs d’Arminio composent la fin du disque, ainsi qu’une cantate sur un texte de Metastase, comprenant deux airs. J’ose trouver que le choix est trop monotone : on n’a choisi là que de fort beaux airs mais de caractères trop proches les uns des autres, plutôt cantabile avec de longs développements en vocalise lente – notons au passage que la notice de Delamea, d’habitude précis, a la bonté de nous préciser qu’il existe trois versions d’Arminio de Hasse, mais ne nous précise pas laquelle est ici gravée. Supposons qu’il s’agit de la première, écrite pour le tout jeune Carestini. Enfin, Genaux trouve dans ces extraits d’Arminio un langage qui lui parle avec naturel, véritablement ressenti : cela s’entend, difficile de le décrire. Dommage donc que le programme se soit cantonné dans une couleur un peu uniforme. Tout l’arsenal belcantiste est ici mis à l’épreuve : longues tenues, tessiture étendue et écarts, longues vocalises lentes, diminutions, et notamment ce que les consoeurs de Genaux sont souvent incapables de réaliser ne serait-ce que correctement : mordants, gruppetti et surtout trilles, largement sollicités et parfaitement exécutés. La phrase musicale prend enfin son sens avec ces petits ornements subtils et essentiels, dont la mezzo est prodigue. Sa précision rythmique lui permet aussi de rendre parfaitement le « swing » propre à Hasse, ses effets de surprise caractéristiques. Bref, l’exécution de ces airs est remarquable ! Avec d’ineffables beautés au détour d’une vocalise tendant désespérément vers un aigu lumineux, ou d’une couleur inattendue et attendrie.

La cantate « La scusa » est basée sur un texte assez spirituel de Metastase, d’un dynamisme inhabituel puisque pendant le second récitatif, le jeune homme s’adresse à la jeune fille qui réagit à ses paroles, ce dont le narrateur nous fait part, et qui annonce le second air. La tessiture est assez grave et peu étendue, contrairement aux airs d’Arminio, et le style plus nettement pré-classique, datant de 1760 environ. L’orchestration du premier air est tout à fait intéressante avec ses éclats de cors, ses touches de flûte, de douces couleurs aux hautbois, et ses cordes graves ronronnant comme des musettes, le tout donnant une image pastorale tout à fait adaptée au climat de la cantate. Le style se veut aussi plus directement expressif.

Les récitatifs et, notamment le second, sont très vivants et joliment orchestrés.

Le second air est plus enlevé, gracieux et plaisant (mélodie très accrocheuse), et conclut le disque avec allant, sur cette ostinato de basses que toute une génération de compositeurs s’est appropriée dans les airs virtuoses. On regrette tout de même de ne pas entendre d’air de bravoure de Hasse plus décoiffant, qu’elle aurait si bien pu rendre. 

Un disque un peu frustrant en somme, sorte de rendez-vous en partie manqué, mais qui révèle tout de même des pages très belles et magnifiquement rendues. On y voit la confirmation de l’affinité de Genaux avec le style « napolitain », celui des castrats Carestini, Farinelli, Monticelli, et on l’attendrait plutôt dans le Haendel d’Alcina, Ariodante, Arianna in Creta, Serse, ainsi que les compositeurs comme Hasse, Pergolesi, Porpora, Leo, Vinci…De fait elle a déjà chanté Ariodante (le rôle titre) aux USA, il serait intéressant d’en entendre la trace. Le TCE ne la distribue qu’en Polinesso…

C’est aussi, d’un pur point de vue vocal, une des chanteuses les mieux armées techniquement pour ce répertoire, et on ne peut que souhaiter l’entendre le plus souvent dans ce type de rôles.

Vivica Genaux en concert au TCE avec la Cetra / Attilio Cremonesi 

 

Ce concert étaient au départ supposé reprendre le programme du disque. Mais heureusement Genaux, cette fois-ci accompagnée de La Cetra de Cremonesi, a choisi d’incorporer un extrait d’Ariodante, et quatre airs d’opéra de Hasse à la place des trois d’Arminio, et des cantates. Heureux choix, qui reproduit enfin la diversité du style riche et fluide de ce très grand compositeur

Le concert débute sur un extrait peu intéressant de la Water music, qui laisse un peu à craindre pour la suite du concert. La mezzo entre en scène dans un tailleur-pantalon et les cheveux longs relâchés.  On note d’emblée que la voix a des couleurs plus libres qu’au disque ; le timbre, particulièrement dans le grave, sonne moins « écrasé », et plus naturel. L’aigu est certes petit mais facile, quant à la projection, difficile de juger, étant placé dans les premiers rangs du parterre, ce qui ne m’a privé d’aucun détail des mimiques de cette belle chanteuse.

Le public est gagné dès « Fammi combattere », impliqué, sombre. La mezzo prend le temps de se placer dans l’affect de l’air à interpréter pendant qu’un continuiste improvise au clavecin avant la folie d’Orlando. L’interprétation et le chant sont ici bien plus prenant qu’au disque : on est presque convaincu, c’est d’autant plus difficile pour un passage qui perd beaucoup hors contexte, et exigeant pour le public en début de concert. Notons que ses ornements ne sont pas calqués sur ceux du disque, et qu’ils se distinguent par leur originalité et leur goût.

Découverte de son interprétation de « Scherza infida » : la musique est d’un style qui pourrait lui convenir, et vocalement, c’est superbe, et la chanteuse s’implique beaucoup. Mais on n’est guère ému, d’abord à cause des errements de l’orchestre, et car la reprise, très ornée, se révèle plus appliquée et démonstrative que touchante, dommage. On ne peut pas traiter Haendel comme Hasse, s’il fallait le prouver ; on me permettra ici une petite parenthèse à ce sujet :

Je verrais plutôt Haendel comme un musicien de l’introspection, où le sentiment est explosif, violent, et très « humain » (comme chez Vivaldi). Chez Hasse et les napolitains, on est plutôt dans la sublimation du sentiment, dans la tension mélancolique vers un idéal avec une élégance désespérée, dans un chant finalement plus archétypal encore d’expression. Le chant et les ornements de Hasse cherchent à échapper à l’affect douloureux, retrouver un idéal (dans les caractères typiques du primo uomo castrat loin des réalités terrestres), ce qui peut être très touchant.

Haendel me semble plus fouiller les tréfonds de l’âme pour l’exprimer ensuite : l’interprétation de Scherza infida par Von Otter, ou Kozena, ou encore Kasarova, tendent à descendre toujours plus profondément dans la douleur, tandis que Genaux (ou même Jaroussky) donnent une version galante, qui cherche à sublimer : c’est très beau, mais cela convient moins à cette musique, et émeut moins.

En revanche, la virtuosité arpégée, les écarts et les traits soudains de « Sta nell’ircana » sont très napolitains d’expression, et sont magnifiés par la prestation superlative de Genaux, souveraine et stupéfiante : les larmes me montent aux yeux et mon souffle se coupe pendant la reprise, chahuté par les vocalises. Bien évidemment, la première partie du concert est ainsi close sur un triomphe.

Ce sont surtout les inédits de Hasse composant la seconde partie du concert qui m’intéressaient, je l’avoue !

Le premier air est « Superbo di me stesso » (rappelant la mise en musique de Lampugnani, il faut dire écrite pour le même castrat), envolée virtuose très élégante et jubilatoire écrite pour Monticelli, et qui tend des pièges non négligeables en terme de tessiture et d’agilité.

Suit une scène dramatique écrite pour Faustina Bordoni (très adaptée à une tessiture de mezzo), prenante et exigeante: "Son morta...Nelle cupe orrende grotte" de Senocrita. Genaux est parfaite d’expression, dans les parties plus déclamatoires de cet air d’ombra torturé, mais aussi de redoutables échelles de trilles qu’elle seule peut maîtriser. On entend bien, malheureusement, que l’orchestre donne ici une idée seulement de ce que pourrait être le morceau.

L’ouverture de Ciro riconosciuto est tout de même agréable à entendre, malgré les limitations de l’orchestre.

À son retour, Genaux chante « Fra quest’ombre », tiré du rôle de Selim de Solimano qu’elle avait déjà donné intégralement à la scène. C’est une page pathétique, sur un thème littéraire similaire au « Se mai senti spirarti sul volto » de Metastase, très belle, et sombrement colorée de cors. L’air a beau être fort long, l’attention se maintient, et l’artiste touche.

Enfin, « Nocchier che teme assorto », tiré de Cajo Fabrizio, est une page pour castrat soprano – de tessiture assez aiguë – d’une agilité frappante, et que Genaux enlève comme une explosion de joie, avec un brio et une facilité qui ravissent, au sens le plus baroque du terme. On est loin de la formation fournie est virtuose dont disposait Hasse à Dresde, et les deux cornistes naufragent complètement dans leurs longues (et il est vrai impossibles) cadences à découvert dans cet air. La salle explose de contentement. Vivica Genaux semblent bien complice des pauvres cornistes rougis par l’effort, leur lançant clins d’œil et sourires pendant leurs redoutables passages.

Juste après, en bis, Genaux a le culot d’affronter un autre air d’une difficulté plus terrible encore : le très virtuose « Di quell’acciaro » - toujours de Hasse – tiré de Solimano, comme je le prévoyais et l’espérais. Son interprétation surclasse de très très haut la difficile « négociation » avec cette tessiture impossible et les longs traits savonnés par Iris Vermillion lors de la captation radio. Genaux se paie le luxe de diminutions absolument meurtrières qu’elle arrive à imposer. L’occasion aussi de mesurer la prestation de La Cetra et de Cremonesi avec l’interprétation de Jacobs, bien meilleur.

Enfin, la mezzo offre un second bis : « nous allons refaire Nocchier che teme assorto » annonce le chef. Genaux lui demande « ma vuoi rifare tutto ? » mais oui ! L’air en entier est donné avec autant d’agilité et d’autorité, et cette grâce et virtuosité sidérante, qui font enfin comprendre comment l’on pouvait se pâmer à l’écoute de cette musique et de ses grands interprètes.

Le public réserve un triomphe à la chanteuse, se lève en partie, et applaudit même généreusement l’orchestre et le chef.

Je repars émerveillé et conquis, et peste qu’aucun micro n’ait capté ces merveilles.

 

PS :

Pour voir un long entretien de Vivica Genaux, où elle reprend et développe les éléments révélés dans l’interview sur Operadatabase sur Hasse – qu’elle aime tant – sur la captation de son timbre, sur la vie culturelle de son Alaska natale… allez sur Artspass.

Elle y interprète aussi, en ouverture, une belle version ornée d’ « Ombra fedele » (de Broschi), mais seulement la « reprise », puis « Cruda sorte » de l’Italiana, et en clôture « Oh wouldn’t it be lovely » de My fair lady. Le tout accompagnée au piano.

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2 décembre 2006 6 02 /12 /décembre /2006 16:14

Bibliographie et documents :  

 

Sur Angelica Catalani
« Possedeva ella una voce sonora, potente ed insieme dolce, pastosa, e son d’opinione che la si potrebbe paragonare alla splendidezza che fu della Banti, alla sensibilità della Grassini, all’energia soave della Pasta, alla flessibilità deliziosa della Sontag, e ai tre registri perfetti della Malibran. I modi di canto li doveva a Pacchierotti, Marchesi e Crescentini: in fatto di gruppetti, volatine, trilli e mordenti, ella li eseguiva a pennello; la sua esecuzione era pura ed articolata in ogni passaggio, o difficoltà, che le si presentasse. Ne’ pezzi concertati e nei finali ella animava i cantanti, i coristi, e l’orchestra stessa: predominava sopra ogni cosa, e le sue belle note si sentivan chiare, e non istrillanti fuori da qualunque strepito; né v’è Beethoven, Rossini, né altro lucifero musicale ch’avesse potuto coprir quella voce divina. Non era allora ben profonda nella musica, ma pure guidata da ciò che sapeva, e dall’organo perfetto del suo orecchio, imparava in un momento ogni pezzo di musica semplice o complicato. Ma oltre l’essere stata una cantante superiore, ella fu pure un’attrice eccellente. Dotata di un fisico leggiadro e maestoso, vita snella, fisionomia seducente, era nobil nel serio, tenera nel patetico e buffoncella nel comico ». 

Texte tiré des « Annedoti » de Giacomo Gotifredo Ferrari, son accompagnateur au King’stheatre.

Disponible ici.

 

- Une lecture aussi passionnante qu’indispensable : Histoire du bel canto, Rodolfo Celletti - Fayard. 
Une somme, un ouvrage passionnant et essentiel pour saisir l'essence et le style de cette musique. 

 

- Version "digest" reprenant de TRES TRES près certains passages du précédent : Le Bel Canto - série Que sais-je ?, Christophe Combarieu.

 

- Malgré de nombreux manques et frustrations, on trouvera de passionnantes notices dans "Dieux et divas de l'opéra" (des origines au romantisme), Roger Blanchard, Roland de Candé, chez Plon - mais il y a eu une réédition récente en un volume chez Fayard en 2004 avec moins d'illustrations.
On y trouvera des notices détaillées sur De Amicis, Gabrielli, Mara, Billington, Catalani.

 

- 1001 opéras - Piotr Kaminski, Fayard. Là encore, déjà une référence. 

 

- Notices d'accompagnement des intégrales de certains disques : ici notamment les textes passionnants de René Jacobs accompagnant le récital Farinelli de Viviva Genaux, où j’ai retrouvé le détail des citations des théoriciens évoqués en début de ma notice.

 

- Goldberg, numéro 29 : « Vincente Martin Y Soler » par Juan Bautista Otero
Consultable sur internet, ici.
On y trouve notamment une analyse de certains opéras sérieux de Martin Y Soler, où s’illustra Maria Balcucci.

 

- Groves dictionnary of opera

 

- Grosses Sängerlexikon, K.J. Kutsch, Leo Riemens

 

 

 

Sur Internet : 

 

- pour les livrets métastasiens un indice des noms intéressants, en fonction de leurs créations métastasiennes : ici

(malheureusement le lien a l’air mort, mais on peut parfois, lors du recherche, consulter certains pages en cache).

 

- Les livrets encore : ici 

 

- Celui-ci, je l'adore : ici
On y retrouve les informations publiées au début des livrets édités suite aux représentations, avec la distribution. Une somme passionnante avec un outil de recherche.

 

- Ne pas oublier l'excellent haendel.it 
Avec des portraits et des parcours extrêmement précis pour certains castrats et cantatrices (Gabrielli par exemple, avec le détail de ses anecdotes piquantes).

- En anglais : biographies très détaillées sur Mara, Billington, Gabrielli, Catalani et bien d’autres avant et après : ici

-Celui-ci est bien aussi, pour les chronologies, même si tout n'y est pas, bien évidemment!

-En allemand, nombreuses notices sur les artistes actuels et d’autrefois : ici

- Assez complet, avec beaucoup d'informations intéressantes, et en français (enfin ! me direz-vous), mais s’arrêtant avant l’époque classique : operabaroque.com

 

 

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2 décembre 2006 6 02 /12 /décembre /2006 15:58

Autres témoignages de vocalité similaire :

 

Petit panorama européen.

 

 

Si les airs virtuoses pour soprano de Il Sogno di Scipione, Mitridate, Il Re Pastore, Ascanio in Alba ou La Betulia liberata sont parfois assez aigus sans pour autant être stratosphériques, il est des interprétations qui donnent une idée de ce que pouvaient en faire les grandes divas de l’époque : écoutez le “Nel tuo gentil sembiante” de Dessay (Fauno dans Ascanio in Alba, récital « Mozart heroine »), à l’ornementation superbe et exubérante, tout comme son “Al destin” de Mitridate (en intégrale), assumé en soprano aigu. Voir aussi du côté de Renée Fleming, vocaliste malhabile dans “Lieve son al par dal vento” du Sogno di Scipione, mais qui y colle un beau contre-sol (récital Mozart).

 

Exemple superbe, notamment des techniques staccate très adéquates pour cette musique (moins dans ses Haendel et Vivaldi…), les interprétations de Sandrine Piau, dont le disque Mozart a été justement fêté.

 

Pour rester dans l’orbe mozartienne, citons Blondschen dans Die Entführung aus dem Serail  qui plante des contre-mi dans “Durch Zärtlichkeit”. La créatrice, Therese Teyber, n’était pas une très grande chanteuse, contrairement à sa sœur Elisabeth Teyber, cantatrice fameuse et créatrice du rôle de Circé dans le Telemaco de Gluck, rôle assez dramatique, qui exige cependant un aigu facile dans l’air d’entrée. Therese Teyber s'est illustrée dans la reprise prestigieuse de Il Ritorno di Tobia.

 

Cet oratorio de Haydn s’inscrit dans une tradition dont on trouvera le détail sur le blog de Bajazet (passionnantes notices), et si l’Esther de Carl Ditters von Dittersdorf n’est pas extrêmement exigeant pour les voix de soprano, le Giob du même propose dans le rôle de Zara une vocalité faite d’écarts impressionnants et de suraigus tout à fait frappante, surtout dans la brillante interprétation de R. Lichtenchtein chez CPO. Toujours dans l’oratorio institutionnel, Mosè in Egitto de Kozeluch contient un air de comparaison, “Colpo di vento alpestre” fort plaisant, et volontiers inscrit dans ce type de vocalité, c’est du moins ce qu’en fait S. Kermes, ici vocalement à sa place à défaut d’être passionnante. L’oratorio de Haydn précité préserve enfin, lui aussi, de grandes pages où les sopranos titulaires de Raffaele ou Sara sont confrontés à de larges écarts et des aigus acérés (rôles créés respectivement pas Barbara Teyber – encore une ! – et Maddalena Friberth, une des chanteuses au service d’Esterhazy).

 

 

Restons dans une tradition germanique, où l’on semble avoir toujours apprécié les voix aiguës, avec le écritures tirant volontiers vers le haut de Hasse ou Graun. On écoutera de ce dernier Cleopatra e Cesare (Agile Janet Williams avec Jacobs chez Harmonia Mundi), et Eupaforice (ainsi que le général Pilpatoe) dans Montezuma, qu’incarna brillamment Malas-Godlewska à Montpellier. Pour autant, les sopranos stars à Dresde, Bordoni puis Mingotti, ne sont pas du style suraigu.

 

 

Mannheim sera la scène des Wendling, où brille particulièrement la fameuse Elisabeth, chanteuse considérable au niveau local et même national. On ne saurait réduire sa vocalité à un simple soprano léger, car d’évidence le centre de gravité de sa voix et son art étaient ailleurs ; J.C. Bach dans Temistocle ne lui impose pas de pirouettes incroyables dans l’aigu (il faudrait entendre sa Celia dans le Lucio Silla du même). Elettra dans Idomeneo propose tout de même, en guise de couronnement du rôle, des échelles de notes piquées jusqu’à l’ut qui s’inscrivent dans ce type de vocalité, sans parler de l’air de concert “Sperai vicino il lido” au suraigu très sollicité. De fait, cette attribution du musicologue Albert Einstein est une supposition, contestée. L'air n'en est pas moins superbe, interprété par Edda Moser (format Dorothea Wendling assurément !), ou Dessay, Gruderova...

 

 

De la même façon, si Vitellia (le trio “Vengo... aspetatte”), ou dans une moindre mesure Aspasia dans Mitridate (tout de même très sollicitée dans l’aigu) donne sporadiquement dans une écriture aiguë, il faut y voir la marque des techniques étonnantes de l’époque, et des figures vocales à la mode, plus que la nature profonde des voix de Marchetti-Fantozzi ou Bernasconi (créatrice d’Alceste, rôle bien éloigné du soprano aigu, ce qui ne laisse pas de conjecturer sur sa voix). Soulignons que K. Cavalieri, célèbre première Konstanze de Mozart, interprète du Schauspieldirektor, ou de Raffaele du Ritorno di Tobia, pourrait également figurer dans ce panorama, armé de ses contre-ré récurrent ; mais là encore l’ampleur supposée de sa voix et son assise dans le grave et le médium me l’ont fait mettre de côté. Le “Mi tradi” de Don Giovanni, ajouté pour elle, le montre asssez.

 

 

Fetonte de Jommelli, créé à Ludwigsburg en 1768 et redonné à la Scala en 1988, propose de magnifique passages pour colorature aiguë, dans les rôles de Thetis et de La Fortune , rôles confiés à une Lucianna Serra supersonique, et à la jeune et brillante Sumi Jo. Les deux autres rôles féminins sont plus centraux. La même Serra chante au disque Edonide dans Alcide al Bivio de Righini, de 1790. Là encore on peut supposer une écriture du même style, mais il faudrait entendre l’oeuvre pour le confirmer.

 

 

En Italie, outre les célèbres De Amicis, Gabrielli, on pourrait citer aussi Cecilia Grassi, une des premières cantatrices, selon le “guide de l’opéra” de Fayart, à utiliser le registre suraigu (contre-mi). Elle débute en 1760 à Venise, et après avoir parcouru l’Italie, part pour Londres où elle charme surtout le compositeur J.C. Bach, et crée plusieurs de ses oeuvres anglaises, dont Endomione, et Gioas, tous deux disponibles au disques. Ces intégrales ne permettent guère de se faire l’idée d’un soprano exceptionnel, et de fait les commentaires de Burney sur elle sont plutôt neutres.

 

Dans une certaine mesure, on peut aussi évoquer la mise en musique de “Ai passi erranti” de La Passione di  Nostro signore Gesù Cristo par Salieri, interprété par Melba Ramos (direction Spering, chez Capriccio), plus aiguë que les versions Myslivecek, Paisiello, sans parler de Caldara, qui n’aurait pu se douter, à son époque, des cimes atteintes plus tard.

 

 

D’autres cantatrices italiennes réputées créèrent des rôles aux aigus faciles sans être systématquement stratosphériques, comme Masi-Giura, créatrice du Vologeso de Jommelli pour l’Allemagne (G. Rossmanith avec Bernius), ou première Servilia dans La Clemenza di Tito de Gluck, ainsi que la Girelli (Le Feste d’Apollo de Gluck, Bradamante dans Ruggiero de Hasse, Silvia dans Ascanio in Alba)  ou la Falchini (seconda donna dans les même deux opéras), voire Clementina Spagnoli, qui s’illustre un temps dans les oeuvres de J.C. Bach, par exemple (Alessandro nell’Indie), ou Di Majo (Astrea placata, dont Ciofi chante un air de tessiture relativement haute mais doux).

 

Ciofi, par ailleurs, dans le même récital, plaçait des airs inédits de Cimarosa (tiré de Demetrio), ou Piccinni (Ipermestra daté de 1772)  riches en coloratures aigus. Là encore j’ignore pour qui ils furent composés.

 

En outre, la fameuse Brigida Banti, phénomène du chant italien et star à Londres à la fin du siècle, se distingue par une voix très étendue, d’une agilité rare, et d’un timbre pénétrant. La Scèna di Berenice que Haydn lui compose pour une éxécution de concert est plutôt assumée par des voix graves. Cependant, les airs que Paisiello lui écrit dans I Giuochi d’Agrigento, brillante oeuvre de circonstance inaugurant la Fenice de Venise, sont hérissés d’aigus piqués au sommet d’une tessiture il est vrai assez longue. Martorana s’en tire plutôt très bien dans le live de Martina Franca, notamment avec un air superbe acte III.

 

Question de génération : la carrière de Cimarosa, comme de Paisiello, est marquée par la collaboration avec de vrais soprano suraigus – qui s’illustre franchement dès les années 1770. Ainsi dans son Oreste de 1783, une certaine Maria Bertaldi chantait le contre-sol (pas de témoignage sonore). Et pour souligner combien cette écriture contaminait même les voix masculines, citons le Montezuma romain de Paisiello, en 1772, proposant dans le rôle principal le castrat Giuseppe Francesco Debenedetti, qui ose dans “In mar di tanti affanni” des coloratures suraiguës jusqu’au contre-mi bémol (Des étudiantes américaines ont apparemment donné l’opéra à titre “documentaire”).

 

Dans la même veine, très aiguë,  et daté de la toute fin du XVIIIème, Sonia Visentin culmine au contre-sol dans l’intégrale du Teseo Riconosciuto du jeune Spontini (Dynamic). Je ne sais malheureusement pas qui a créé ce rôle. En revanche, on sait qu’une certaine Grossi-Silva fut l’héroïne de l’Ines de Castro de Zingarelli, au tout début du XIXème ; l’écriture du finale audible chez Opera Rara laisse entendre une séduisante écriture belcantiste encore très ancrée dans le siècle à peine écoulé.

 

On sait aussi que c’est une certaine Luisa Alberoni qui fut Creusa dans le Demofoonte de Schuster, avec ses suraigus piqués typiques de l’époque (Melnitzki avec M. Remy chez Deutsche Harmonia Mundi). Plus aigu encore est le rôle de Psiche du même Schuster, qui semble atteindre au moins (!) le sol5. J’ai supposé que le rôle était destiné à Maria Balducci.

 

 

Le goût des voix aiguës avait bien entendu gagné l’Europe entière, et jusqu’à St Petersbourg : outre le passage de la Gabrielli , une retransmission radio de la Cleopatra   de Cimarosa, qui y fut créée en 1788, et rejouée là-bas, laisse entendre une partition donnant volontier dans le suraigu pour le rôle éponyme (avec Olga Trifonova). Créé à la même époque, pour sans doute la même chanteuse, La Vergine del sole (adaptation de Cora ed Alonso) contient un beau rondo chanté en concert par Patrizia Ciofi. Plus tard, en 1799, Sarti jouait là bas un de ses derniers operas, de dimensions d’ailleurs réduites : Enea nel lazio est d’un style assez desuet, mais le rondo de la soprano au I est plutôt réussi et exige un aigu facile (Jana Ivanilova chez Bongiovanni). Dommage que les créatrices de ces rôles demeurent mystérieuses.

 

 

En Suède également, et malgré les influences fortes de la tragédie française et du style réformé de Gluck, la cour de Gustave III n’est pas insensible au style fleuri de la tradition italienne, jusque dans les premières oeuvres suécophones : Naumann, héritier de l’école de Dresde, compose un ravissant “Med din sång, du redan funnit” (par ton chant, tu as déjà trouvé) confié à Antiope dans Amphion. De même, Cora et Zulma sont des sopranos assez aigus (surtout le dernier air de Cora “Jag lever, och lever för er”: je vis, et vis pour vous) dans le fameux Cora och Alonso, repris dans sa version allemande (déjà arrangée au 18ème) par R. Jacobs avec la splendide I. Kalna. La Proserpin de Kraus, autre oeuvre en suédois, me semble relativement économe en effets de ce genre.

 

 

Nous avons déjà évoqué Londres, centre musical incontournable à la fin du XVIIIème, plus pour ses chanteuses que pour la création musicale locale en elle-même (dans le répertoire italien, on y donne beaucoup de pasticcios). Les grandes cantatrices aiguës y passent toutes : De Amicis, Gabrielli, Billingtion et Mara, et avant elle, les Anglaises Cecilia Young, créatrice de seconds rôles chez Haendel puis chez Arne et Lampe d’oeuvres anglaises (Emma Kirkby lui consacra un disque hommage) et voix assez haut placée (Morgana, Dalinda...), Charlotte Brent qui créa la fameuse Mandane de Arne, ou Anna Maria Crouch, reprenant cette incontournable Mandane à la scène, et créant de nombreux ballad operas (de Storace) avec son compagnon Kelly. À l’image de l’opéra comique français, ces ballad operas aiment le son pur et la fine ornementation du soprano léger. Ainsi il existe au catalogue des oeuvres de  Dibdin, peut-être de la même eau, car datées de la même époque : on trouve sur le même disque The Ephesian matron, The brickdust man, et The grenadier (respectivement donnés en 1769, 1772, 1773).

 

 

En France, si la tragédie lyrique reste l’apanage d’amples sopranos dramatiques à l’aigu limité, l’opéra comique, plus inspiré des Italiens, se plait à multiplier ariettes légères et virtuoses, timbres purs et virginal. La célèbre Dugazon, jeune, fut un des exemples de ces voix si appréciées, dans Grétry notamment, avec des arietttes très italianisantes : “Je romps la chaîne qui m’engage” de L’amant jaloux pourrait être un aria di bravura italienne (écoutez Sumi Jo dans son récital Decca, direction Bonynge, très réjouissante), ainsi que le très décoratif air de la fauvette de Zémire et Azor (qui fit les régals de Sutherland ou Mesplé). Parfois Grétry compose directement en Italien, d’ailleurs : “Fra l’orror della tempesta” dans La Caravane du Caire. La délicieuse Karthäuser a publié chez Ricercar un charmant récital Grétry conclu par cet air.

 

 

Enfin, citons comment cette vocalité a pu être moquée autant que célébrée dans l’opéra bouffe, puisque chacun connaît le très exigeant “Furia di donna irata” gravé par Sutherland dans “The Art of the prima donna”, et tiré de La Buona figliola de Piccinni, compositeur largement rompu au genre seria. Les notes piquées à l’assaut de l’aigu sont bien le témoin de leur époque. Les coloratures aiguës des airs d’opera bouffe de Salieri (“Vi sono sposa” de La Fiera di Venezia), ou Martin Y Soler (certains passages pour Ciprigna dans La Capricciosa corretta, écrit pour la brillante Anna Morichelli), montrent que le genre bouffe était en effet perméable, même avec un sourire en coin, au style vocal seria alors à la mode, riche d’aigus. Il faut dire que certaines cantatrices passaient volontiers d’un genre à l’autre.

 

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2 décembre 2006 6 02 /12 /décembre /2006 15:32

Témoignages sonores :  

 

 

 

Catarina Gabrielli 

- Claudia dans « L’Innocenza Giustificata » de Gluck (Maria Bayo avec C. Moulds)
- Antigona dans « Antigona » de Traetta (Maria Bayo avec C. Rousset)
- « La Danza » de Gluck (chez Orfeo, direction T. Bugaj)
- Edonide (Aratea ?) dans « Alcide al bivio » de Hasse (Maria Rüping, direction M. Schneider)
- Argene dans « Il Bellerofonte » de Myslivecek, alors son amant, aux côtés de Raaff et Mazzanti (Celina Lindsley avec Z. Pesko)
- Aricia dans « Ippolito ed Aricia » de Traetta (Ciofi avec D. Golub chez Dynamic)
Qui a voulu nous faire croire que Bayo était la réincarnation de la Gabrielli ? voix de soubrette, virtuose malaisée, aigus poussifs, on est loin des exigences, même si les œuvres valent le coup. En revanche, il paraît que Ciofi est superbe en Aricia. 

 

Anna De Amicis  

 

- Giunia dans « Lucia Silla » de Mozart (Gruberova avec N. Harnoncourt)
- Armida dans « Armida abbandonata » de Jommelli (Malas-Godlewska avec C. Rousset)
- Air « Se tutti i mali miei » que Mozart écrivit à rome en 1770 (hypothétique)
- Dircea dans « Demofoonte » de Jommelli, retransmission radio (hypothétique) 
-
Miserere de Jommelli (elle l’eut à son répertoire – plusieurs versions, dont une chez Bongiovanni)
Par chance, il existe de bonnes versions en intégrale des premiers rôles évoqués, notamment Giunia. 

 

Aloysia Weber-Lange  

 

- Album hommage avec les airs de concert écrits par Mozart par Cyndia Sieden, qui semble indisponible.
- Airs de concerts et d’insertion de Mozart « Ah se in ciel benigne stelle », « Popoli di Tessaglia », « Non so donde viene », « Nehmt meinen Dank », « Mia speranza adorata », « No che non sei capace » … à compléter - il existe beaucoup de très bonnes interprétations ! 
- Ornementations du « Cara la dolce fiamma » de J.C. Bach sans doute écrites pour elle par Mozart (A. Christofellis, J. Kaufman, ou Futral chez Opera Rara) 
- Mlle Herz dans « Der Schauspielendirektor » de Mozart (plusieurs versions) 

Josepha Hofer

 

- Die Königin der Nacht dans « Die Zauberflöte » de Mozart (maintes versions ! écouter Moser, Gruberova, Popp…)
- Air de concert « Schon lacht der holde Frühling » de Mozart, incomplet (Gruberova avec Fisher)
L’air de concert « Ohne Zwang, am eigenen Triebe » de Mozart est perdu… 

 

Lucrezia Agujari  

 

- Bauci dans Le Feste d'Apollo de Gluck (Ditte Andersen avec C. Rousset) 

 

Francisca Danzi-Lebrun 

 

- Aristea dans « L’Olimpiade » de Cimarosa, retransmis à la radio (Ciofi avec Marcon)
- Semele dans « Europa Riconosciuta » de Salieri, retransmis à la radio (Damrau avec Muti)
- « La Clemenza di Scipione » de J.C. Bach (Perillo avec Max, Deutsche Harmonia Mundi, et des versions ornées par Mozart de certains air, chez Opera Rara)
- « Günther von Schwarzburg » de Holzbauer (Mc Fadden avec M. Schneider) 

 

Maria Balducci  

- Europa dans « Europa Riconosciuta » de Salieri, retransmis à la radio (Rancatore avec Muti)
- « Ifigenia in Aulide » de Martin Y Soler a été donné en concert en décembre 2003, au festival de musique ancienne de Baeza, avec Olga Pitarch en Ifigenia. Extraits en complément du disque "Orlando" de Porpora.
- Psiche dans « Amor e Psiche » de Schuster, bande privée (attribution supposée, étant donné la date et le lieu de création, similaires à l’Ipermestra de Martin Y Soler, et l’écriture vocale extrêmement aiguë), avec Salomé Haller (il n’est guère charitable de signaler cette prestation). 

 

Gertrude Mara  

??? 

 

Elizabebth Billington  

- Cerere dans « Il Ratto di Proserpina » de Winter, trio “Mi lasci o madre amata” (Eiddwen Harry chez Opera Rara)
- Rosina de Shield : deux airs par Joan Sutherland “When william at eve” et “Light as thistledown” (The Age of Bel Canto” avec Bonynge, Decca). Notons que l’opéra date de 1782 et n’a pas été créé par Billington.
- Air “The traveller benighted” tiré du Love in a village de Arne, par Joan Sutherland. Pareillement, l’opéra est créé antérieurement.

Pour Mara & Billington, on pourra écouter deux opéra dans lesquels elles s’illustrèrent si brillamment :
- Polly Peachum dans The beggar’s opera de Gay et Pepusch (plusieurs versions)
- Mandane dans Artaxerxes de Arne (C. Bott avec Goodwin chez Hyperion). L’air “The soldier’s tir’d” est l’hommage choisi par J. Sutherland à Billington dans son album “The Art of the prima donna”.

Antonia Campi  

??? 

 

Teresa Bertinotti-Radicati  

- Ginevra dans Ginevra di Scozia de Mayr (E. Vidal chez Opera Rara) 

 

Angelica Catalani  

- Air « Son regina, son guerriera » de « La Semiramide » de Portogallo (Devia dans le récital « Arie di baule », impériale !!! Y. Kenny chez Opera Rara est plus à la peine)
- Air « Parmi veder » de « I baccanali di Roma » de Nicolini (Y. Kenny dans « 100 years of italian opera – 1800-1820 », chez Opera Rara)
- Pour les courageux : Nella Anfuso a caqueté des airs du répertoire de la Catalani , avec les variations de son illustre devancière... Voir sur son site.

 

 

 

 

 

 

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5 novembre 2006 7 05 /11 /novembre /2006 23:01

Maria Balducci (1758-après 1784) 

 

On sait en revanche peu de choses sur Maria Balducci, qui semble pourtant avoir joui d’une certaine célébrité : Jérôme de la Lande notait dans son Voyage d’un Français en Italie, publié en 1790, « Actuellement la Balducci passe pour la plus belle voix, comme Marchesi pour les castrats .»
On a reparlé d’elle à l’occasion de la reprise de l’
Europa Riconosciuta de Salieri, dont elle créa le rôle-titre lors de l’inauguration de la scala de Milan en 1778, occasion pour laquelle on avait forcément fait appel à des vedettes du chant. Dans cette même saison, elle brilla dans Calliroe d’Alessandri, Cleopatra d’Anfossi, Troja distrutta
de Mortellari… 
Elle remporte encore de grands succès à Venise, Naples, St Pétersbourg.
Il n’y a plus d’informations sur elle après 1785.
Vocalement, elle semble avoir eu une aisance stupéfiante dans les aigus, et on peut supposer, vue la typologie du rôle d’Europa, qu’elle était également une tragédienne de quelque mérite. Le rôle exige des coloratures culminant (encore en notes piquées) jusqu’au contre-fa dièse. Martin Y Soler, qui lui fit partager l’affiche du San Carlo avec Marchesi et le ténor Ansani dans
Ipermestra  et Ifigenia in Aulide
, lui écrivit de diaboliques échelles en staccate à la tièrce jusqu’au contre-sol (sol5) dans l’air “Son fra l’onde”. 

 

 

Josepha Hofer, née Weber (1758-1819)  

 

 

Grande soeur de la plus fameuse Aloysia (Cf paragraphe suivant), on sait peu de choses d’elle, et elle ne compte certes pas parmi les interprètes de grand renom de son époque. De 1789 à 1805, elle chanta quasiment exclusivement à Vienne. Elle doit de rester à la postérité grâce au rôle de la reine de la nuit qu’elle créa, alors qu’elle était dans la troupe de Schikaneder.
Elle représente la vocalité typique de beaucoup de chanteuses de l’époque, avec ses aigus en notes piquées jusqu’au contre-fa (fa5). Il y en a cinq dans ses deux airs !


Aloysia Lange née Weber (1760-1839) 

 

Dans la famille Weber, quatre filles : le seconde et plus jolie, Aloysia fut aimée de Mozart. Dès 1777-1778, il la fit travailler, et lui dédia de nombreux airs de concert, et fut véritablement son Pygmalion. En 1779, elle entre dans la troupe de l’opéra allemand à Vienne, et désespère Mozart en épousant Joseph Lange en 1780. Il se rabat sur sa sœur Constance, mais continue à écrire des airs de concert à Aloysia, ainsi que Mlle Herz dans Der Schauspieldirektor. Elle est aussi, étonnamment, Donna Anna à la reprise viennoise de Don Giovanni. Elle avait en effet rejoint la troupe de l’opéra italien en 1782.
Elle interprète aussi Sesto de La Clemenza di Tito en concert en 1795, puis se lance dans une série de concerts en Allemagne avec sa sœur Constance, avant son retrait en 1808.
Les airs que Mozart lui composa sont bien représentatifs de l’époque, avec des dimensions volontiers concertantes, de longues mesures de colorature rapide, et des suraigus généreux, jusqu’au fameux contre-sol (sol5) de l’air par ailleurs dramatique “Popoli di Tessaglia”.

 

 

Elizabeth Billington née Weichsel (1765 (68?)-1818)
 

 

Elizabeth naît à Londres d’une mère chanteuse et d’un père hautboïste. Ainsi placée très tôt dans l’univers musical, elle épouse même en secret son professeur de chant Thomas Billington à l’âge de quinze ans. Ses débuts se font à Dublin dans une adaptation de l’Orfeo, mais c’est dans le rôle de Rosetta du très aimé Love in a village assemblé par Arne qu’elle remporte un succès foudroyant à Londres en 1786, ce qui  lui octroie d’emblée le statut de star. Ses prestations suivantes la feront plus apprécier encore de ses compatriotes, incarnant Clara dans The Duenna de Shield, Rosina du même, ou Polly dans le fameux Beggar’s opera. Suite à ces reprises brillantes d’oeuvres chères aux Anglais, elle poursuit dans le répertoire national et crée de nouvelles oeuvres de Shield, et d’autres musiciens anglais.
Parallèlement, elle parachève son éducation musicale avec les musiciens installés à Londres, Mortellari et Sacchini.
Burney dit alors d’elle “nothing but envy or apathy can hear her without delight”, et loue son intonation précise, la brillance et le goût de son ornement, et sa tessiture fort aiguë – elle avait même tendance à octavier vers l’aigu les passages incommodant de ses rôles, car son grave était nettement plus faible. Déchéance de l’art belcantiste, elle faisait cependant partie de ces cantatrices incapables d’improviser les ornements, préparés à l’avance.
Auréolée de sa gloire nationale, La Billington se lance dans une tournée italienne triomphale, avec époux et frère, et crée des oeuvres de Paër, Bianchi, Paisiello, Nasolini...Citons par exemple Gli Sciti de Nicolini à la Scala avec Braham en 1799 (son grand rival à la scène, tout comme la Mara à Londres), ou précédemment le pasticcio Ines de Castro avec le ténor Mombelli et le castrat Domenico Bruni marquant ses début napolitains en 1796. Elle chante aussi devant Napoléon et ses troupes à Bologne.
De retour à Londres, elle partage ses activités entre Covent Garden et Drury Lane, et se présente dans le rôle de Mandane dans le fameux Artaxerxes de Arne. Elle ne néglige pas non plus le King’s theatre, où l’on donne l’opéra italien, et y reprend La Clemenza di Scipione de J.C. Bach, puis en 1806 chante Vitellia dans La Clemenza di Tito de Mozart – avec pour partenaire le ténor Braham en Sesto !Haydn, par ailleurs l’admirait énormément, et lui aurait fait un compliment rare, face au portrait de la chanteuse représentée sous les traits de Sainte Cécile :
au peintre : “Mais vous avez fait une grave erreur 
- Comment cela ? pourquoi ? 

- Vous avez représenté Mlle Billington écoutant les anges ; vous auriez dû représenter les anges en train d’écouter Mlle Billington.” 
M. Kelly, dans ses facétieux écrits, est plus moqueur vis-à-vis de cette chanteuse par ailleurs très douce et très aimée, et raconte par le menu les rivalités de la billington, notamment lors de sa confrontation d’une saison avec le fameux contralto Giuseppina Grassini. Cette confrontation fut à son sommet lorsque les deux prime donnne se retrouvèrent distribuées ensemble dans
Il Ratto di Proserpina de Winter ! On dit que le style pathétique de la séduisante Grassini lui valut une courte victoire. 
Moins amusant, il décrit la terreur de la Billington face à la violence de son second époux, le premier étant décédé lors de sa tournée italienne.
Malheusement, après son retrait des scènes, elle décida malgré tout de le rejoindre en Italie, à Venise, avec toutes les richesses accumulées lors de sa carrière incroyable. Il semble qu’elle mourut des mauvais traitements qu’il lui infligea, en 1818. 

 

 

Antonia Campi née Miklasiewicz (1773-1822) 

 

Cantatrice polonaise, elle chante à Varsovie en 1789, puis Pragues. Elle y épouse le buffo Campi, et interprète des rôles mozartiens : la contesse, le reine de la nuit, ainsi que des œuvres de Paisiello, Salieri, avant d’être invitée en Italie. Elle chante en 1802, pour l’ouverture d’un théâtre viennois, l’Alexander de Teyber sur un texte de Schikaneder, et continue à se produire avec succès à Venise, Prague, Berlin, donnant même une tournée triomphale dans toute l’Allemagne de 1818 à 1819. Cela ne l’empêche pas de monter sur scène, notamment en Amenaide de Rossini. Elle est l’étoile du Hofoper de Vienne de 1818 à 1822, et la première cantatrice nommée « chanteuse impériale » par l’empereur d’Autriche. Elle meurt en 1822, laissant pas moins de dix-sept enfants !
On loua sa technique irréprochable, son contrôle total de sa voix, son staccato perlé… et son contre-sol ! Elle fut certainement une des interprètes à faire perdurer une technique hérité du dernier 18ème au siècle suivant.
Le fait qu’elle ait interprété Amenaide nous permet aussi de souligner combien ce rôle est proche, dans son écriture vocale, du bel canto du 18ème, avec par exemple les figures en notes piquées dans la cabalette de l’air “giusto ciel che umile adoro”, ou encore dans “Temer un danno” d’Adelaide di Borgogna. Ces deux rôles furent d’ailleurs créés par Elisabetta Manfredini, qui, à l’image de la Camporesi créatrice de Bianca dans Bianca e Falliero, était une chanteuse « à l’ancienne ». 

 

 

Teresa Bertinotti-Radicati (1776-1854) 

 

Comme la Campi , Teresa Bertinotti mène sa carrière essentiellement dans le début du 19ème, avec un style et une technique largement hérités de l’art vocal du 18ème. Venue à Naples d§s l’âge de deux ans, elle y étudie d’abord avec une certaine Barbiera, puis débute au teatro fiorentino en 1788, puis dans d’autres théâtre. Elle y interprète Tritto, Guglielmi, Frederici (Virginia). Passant à la scala pour la saison 1794-1795, elle crée Le Danaidi de Tarchi, ainsi que la Rossana de Paër. En 1801, à Venise, elle épouse le violoniste Radicati, qui sera premier violon de l’orchestre local à Bologne, où le couple incarnera un passage obligé pour tout aspirant au cercle musical local, ce dont s’acquitte Paganini. La Bertinotti est alors reconnue comme prima donna dans toute l’Italie : Florence, Turin, Naples, Venise, tant pour son chant que pour sa beauté. Pour l’inauguration du teatro nuovo de Trieste, elle participe à la création de Ginevra di Scozia de Mayr, avec les célèbrissimes Luigi Marchesi et Giacomo David. Elle est aussi l’interprète d’Annibale in Capua de Salieri. Sa réputation s’étend jusqu’à Vienne où elle est très populaire, ainsi qu’à Münich, et en Hollande, où elle reçoit une invitation royale. Son passage londonien, en 1810-1812, est remarqué, et se distingue par son souci de faire produire des opéras de Mozart, tel Cosi fan tutte, où elle incarne Fiordiligi. Son époux lui écrit et fait représenter Castore e Polluce à Bologne en 1815. Néanmoins, peu après la mort accidentelle de celui-ci en 1823, elle se retire de la scène et se consacre à l’enseignement.
La chant de la Bertinotti tel qu’interprété par Vidal dans Ginevra di Scozia de Mayr, est très virtuose, et réclame un suraigu d’une facilité déconcertante – les contre-sols sont ensuite des interpolations de Mlle Vidal. Cependant il faut un contre-mi aisé, ce qui donne une idée des moyens de la jeune Bertinotti.
Ce style très décoratif et peut-être un peu creux n’était pas du goût de tous, sans doute ; une anecdote amusante le rapporte : l’occupation française à Rome mit fin à environ deux siècle d’interdiction papale pour les femmes de se produire sur scène. En 1798, enfin, des femmes purent poser le pied sur les planches de théâtre Alibert, parmi lesquelles notre Teresa Bertinotti. Le public “traditionnaliste” n’apprécia guère sa prestation, et le fit bruyamment entendre (était-ce une partie du public habitué à l’art belcantiste plus fin des castrats ?) au point de faire interrompre la représentation. Bertinotti en rage répondit aux contestataires par un geste peu amène : je vous laisse la saveur du commentaire italien d’origine (trouvé sur romacityblog) : “La cantante non si perse d'animo e rispose facendo il gesto delle corna a chi la contestava”. 

 

 

Angelica Catalani (1780-1849)

 

Evoquons enfin celle qui, plus légendaire que Campi, évoque véritablement le dernier avatar de la grande diva 18ème en ce début du siècle, prêt à s’abîmer dans le romantisme.
Ce n’est pas d'une grande tragédienne qu’il s’agit ici, mais d’un phénomène, qui se produisit surtout au concert, baladant ses airs brillants à travers l’Europe ébahie.
Elle débuta à dix-sept ans à la Fenice dans Lodoiska de Mayr en 1797, et séduit suffisamment pour être engagée les années suivantes, interprétant Zingarelli, Nasolini…Dès 1801, elle est prima donna, à la Scala , puis Florence, Rome.
Elle se rend à Lisbonne, Madrid, Paris, où Paris voudrait bien la retenir… mais ce sera pour plus tard : elle doit se produire à Londres, notamment dans un de ses succès les plus brillants, l a Semiramide du compositeur Portogallo. Elle donne aussi la Vitellia et la Susanna de Mozart. Acclamée, elle reste jusqu’en 1813, donnant même des versions ornées des populaires Rule Britannia, ou God save the King. Le retour de Louis XVIII au pouvoir marque son retour en France : il lui confie la direction du théâtre italien (salle Favart), toujours à prix d’or, qu’elle ne tarde pas à faire couler par sa gestion désastreuse.
Elle est alors contrainte de partir, et parcourt l’Europe de L’Italie à la Russie , avec le compositeur Pucitta, donnant des concerts où elle étale sa virtuosité sans égale et son timbre sublime. Elle finit néanmoins par se retirer, la voix altérée et devant l’affirmation de nouveaux styles : on lui préfère les interprètes de Weber, à Berlin en 1827.
En 1841, une fausse information annonçant sa mort permet à la Revue et Gazette musicale de Paris de publier une notice nécrologique : on y lit notamment « …Et pourtant la voix de la Catalani n’avait pas la puissance qui touche et attendrit, mais elle avait au suprême dégré celle qui éblouit et qui étonne. Pour l’élévation, pour l’agilité, cette voix ne connaissait pas de rivale ; elle montait jusqu’au contre-sol et lançait les gammes chromatiques (…) avec une facilité, une précision dont on ne se fait pas l’idée… »
En fait, la Catalani vint mourir du choléra à Paris huit ans plus tard, touchée par l’épidémie italienne.
En outre, Giacomo G. Ferrarri, observateur musical, compositeur, arrangeur et accompagnateur qui eut l’occasion de collaborer avec la Catalani à Londres, laisse dans ses Annedoti un témoignage énamouré de l’art de cette cantatrice, la comparait aux gloires nouvelles et anciennes (le texte, en italien, est reporté en annexe).
Les qualités et critiques qui la touchent sont celles que formulent déjà Métastase à propos du chant de Mazzanti, celles qui furent formulées à l’encontre d’Agujari, de Mara
On pourrait les reproduire (avec d’infinies nuances - je tente de prendre de vaines précautions !) pour un certain nombre d’interprètes connues de nous : Melba, Patti, Galli-Curci, plus près de nous Sutherland, Devia, Vidal… 


Remarques sur l’interprétation/la perception de ces rôles et types vocaux :

On a beaucoup glosé sur la reine de la nuit, et son écriture acrobatique et suraiguë, seul exemple resté au répertoire d'une vocalité de ce genre. On peut savoir à présent que ce rôle n’a finalement pas une écriture vocale exceptionnelle pour l'époque, et que de nombreuses partitions pour soprano suraiguë le dépasse en difficulté, et surtout en intérêt dramatique. 

Notre regard est déformé par le 19ème, et le 20ème siècle, avec leurs écoles de chant très différentes de celles du 18ème. Le chant virtuose est tombé dans l’escarcelle du soprano suraigu (même les contraltos rossiniens), qui a monopolisé tout l’art belcantiste (surtout romantique) subsistant au répertoire, avec un timbre à l’ingénuité et la légèreté cultivée jusqu’à la niaiserie.

Le baroque, pendant sa longue renaissance et avec les maigres moyens de ses débuts, a bien souvent dû se contenter de petites virtuoses à voix légères et centrées sur l’aigu dans des œuvres où, comme on a pu le voir dans le début de cette présentation, elles n’avaient rien à faire : chez Haendel, Vivaldi, etc…On subit encore, de nos jour, l’insipide Simone Kermes dans les prime donne de ces compositeurs, alors qu’elle pourrait être bien plus convaincante dans les vocalités du second 18ème, armée de son contre-sol.

Il faudra bien prendre conscience un jour que, de la même manière que Rossini en 1820 n’utilise pas le même type de voix que Verdi dans Otello, il ne faut pas les mêmes chanteuses pour Haendel en 1720, et le Cimarosa serio de 1780.

Heureusement, nous savons depuis Callas, puis Sutherland, Horne, etc. que la virtuosité n’est plus l’unique apanage de soprano léger, et que si la partition indique soprano, un mezzo-soprano est bien souvent plus indiqué, les catégorisations vocales de l’époque étant assez imprécises. Nous disposons maintenant d'interprètes suffisamment variées pour coller au plus prêt des divers types vocaux, autant en profiter !

Par ailleurs, saluons certaines cantatrices récentes qui, par leur art, ont su prouver que le soprano léger pouvait être expressif, dramatique, émouvant, tout en délivrant un chant enivrant.

On peut actuellement tout particulièrement souhaiter y entendre (ou déjà apprécier) A. Massis, N. Dessay, S. Piau, E. Vidal, S. Kermes, M. Devia, D. Rancatore, D. Damrau, I. Siebert, P. Ciofi, I. Kalna, etc. Cela élargirait avantageusement le répertoire du soprano léger ou lyrique léger, qui après 1443 reines de la nuit, 134 Olympia, se demande bien quoi interpréter de "nourrissant" dramatiquement ! Sans pour autant se résigner à changer de tessiture (et finir dans des rôles quasi mezzo comme Susanna ou Despina !)

Discographie et bibliographie au prochain épisode.

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5 novembre 2006 7 05 /11 /novembre /2006 21:44

Merci Clément!

The soprano aigu is back:

Le soprano aigu au XVIIIe siècle

 Aux origines – la théorie belcantiste  :

 

À la naissance de l’opéra, toutes les voix, basses, ténors, soprani ou contralti, sont limitées dans l’aigu. Jusqu’à la fin du 17ème, les soprani (femmes ou castrats) n’atteignent le la4 voire le si4 pour que de façon exceptionnelle, à l’exemple du prologue de Il Pomo d’oro de Cesti en 1668, contenant un si bémol 4, ou le protagoniste du Sant’Alessio de Landi, qui doit même donner le contre-ut (do5). L’art vocal belcantiste privilégie alors nettement l’homogénéité des registres, un chant pathétique et élégiaque – nombreux lamenti – ce qui implique des aigus émis en fausset, jamais forcés, doucement intégrés au reste de la tessiture, tout comme les graves. En 1474, Conrad Von Zabern décrivait déjà dans son traité De modo bene cantandi les qualité d’une voix ayant « une sonorité ample et puissante dans les graves, réservée dans le medium, et de plus en plus douce dans les aigus ». La virtuosité est exécutée avec précision et délicatesse. Plus tard, et dans une période pourtant caractérisée par une chasse à l’aigu, Johann Adam Hiller, cantor à Leipzig rappelle ces préceptes idéaux (Anweisugen zum musikalisch-zierlichen Gesange, 1780) et qu’il ne faut autoriser les aigus à une jeune chanteuse que lorsque « les notes basses sont pleines et rondes, le chant se faisant plus doux en montant dans les aigus, pour éviter de forcer la voix… Gagner un degré dans les basses vaut mieux que d’en gagner deux dans les aigus qui sonnent comme le sifflet d’un oiseau ». 

 

Les aigus sont donc au départ limités, et le plus souvent effleurés dans un cadence ornementale.

 

 

La conquête de l’aigu  :

 

Au tournant des 17ème et 18ème siècles, cependant, de grands compositeurs, annonçant l’opera seria à venir, contribuent à hausser l’ensemble des tessitures vers l’aigu, à l’exemple d’Alessandro Scarlatti, ou Agostino Steffani. Ces compositeurs influencèrent notablement Haendel. Avec eux, le soprano se mit à donner plus fréquemment la4 voire si4, tandis que la virtuosité s’intensifiait. 

 

Néanmoins, Haendel, dans son motet « Saeviat tellus inter rigores », écrit pour un castrat d’église romain, exige des contre-ré (ré5). Pour le soprano dramatique Pilotti-Schiavonetti, spécialisée dans les sorcières amoureuses, il note un contre-ut (do5), dans Armida de Rinaldo, en 1711. 

 

En effet, la génération suivante, avec Lotti, Haendel, Vivaldi, Porpora, Vinci, etc. constitue un sommet de l’art belcantiste ; dès les années 1720, la tendance à étendre les voix vers l’aigu s’est généralisée, et un nouveau type de chant, porté notamment par l’école de Porpora et ses élèves illustres, fait son apparition : plus en force, plus virtuose, appuyé sur une émission de poitrine jusque dans l’aigu pour des effets de bravoure plus percutants, avec des vocalises à pleine voix. Farinelli est l’exemple-type de cette tendance, avec de grands sauts mettant en valeur les différentes couleurs et la puissance de son immense registre vocal, du do2 au do5, et d’interminables coloratures... Les sopranes sont invitées à suivre cette tendance, bien entendu, et de vraie voix féminines aiguës font leur apparition : Francesca Cuzzoni, au trille inimitable, à la voix d’or, possède encore un style centré sur l’élégiaque, l’ornementation délicate, mais est capable d’assumer une tessiture de vraie soprano lyrique, les appuis sur le la4 étant même typiques de son style, ce qu’on peut noter dans les airs que lui écrivirent Haendel, Bononcini… 

 

Sa grande rivale Faustina Bordoni présente une tessiture « à l’ancienne », limitée dans l’aigu et finalement assimilable à nos mezzo-sopranos actuels, comme la plupart des rôles de soprano du 17ème.

 

Suite à la Cuzzoni , d’autres cantatrices présentent un aigu plus aisé, et l’écriture vocale les porte toujours à plus de vaillance dans l’aigu, avec les compositions d’un Hasse par exemple, qui étend encore les tessitures. Le rôle de Cleopatra écrit par C.H. Graun pour la fameuse Astrua en 1742 demande une vraie soprane à l’aise dans l’aigu, tout comme, plus tard, l’Eupaforice de son Montezuma destinée à la célèbre Aschieri. Mais les suraigus ne sont pas encore écrits… 

 

Difficile, étant donné la grande rareté de témoignages discographiques d’œuvres des années 1740-1760, de donner une idée plus précise de l’évolution vers le suraigu, mais il y a à cette époque un nouveau basculement du style, audible entre les premières œuvres de Hasse et les dernières. Par exemple Cleofide de 1731 écrit pour le soprano grave Bordoni, Il Ruggiero riche en colorature et aigus en 1771, tant pour les soprani Girelli et Falchini que pour le castrat Solzi.

 

 

Des voix légères et véloces : toujours plus haut  !

 

L’élévation des tessitures et l’infléchissement du style vers la bravoure et la vocalise, et une maîtrise absolue du souffle, n’ont pas laissé le public indifférent. Une surenchère dans ces figures impressionnantes finit par s’installer, ce que beaucoup d’amateurs comme de théoriciens verront comme un dévoiement des principes du bel canto, du goût et de l’opera seria. De fait, la seconde moitié du 18ème n’est pas traitée en profondeur dans L’Histoire du bel canto de Rodolfo Celletti, que nous citons ici : « En définitive, la seconde moitié du XVIIIe siècle, quoiqu’appartenant de plein droit au belcantisme, en atténue l’un des traits caractétistique, à savoir l’ardeur expressive, la sensibilité, en le compensant par une technicité exaspérée .» 

 

En effet, la recherche d’une exécution toujours plus rapide des traits virtuoses d’une grande longueur et difficulté exige le retour à une émission plus légère, moins appuyée. L’extension vers l’aigu se fait aussi avec un retour au registre du falsetto. Les voix-stars sont indéniablement devenues les ténors (baryténors), les sopranos femme, et les castrats soprano (voir le fil sur le ténor serio). Caffarelli, puis Luigi Marchesi, castrats virtuoses et capricieux de très haut vol, étalent leur tessiture qui va allègrement jusqu’au contre-ut pour l’un (Sesto dans La Clemenza di Tito de Gluck), jusqu’au contre-ré pour l’autre (chez Martin Y Soler, ou G. S. Mayr). D’autres castrats comme Gizziello (pour qui Haendel écrit plusieurs contre-uts, notamment dans Arminio), puis Guarducci, Pacchierotti, Crescentini, sont plus connus pour leur finesse d’exécution, leur goût et leur art du cantabile, tout en imposant des tessitures larges et étendues dans l’aigu. 

 

Une anecdote, douteuse, reflète en tout cas parfaitement les tendances de l’époque et ses fantasmes : on raconte qu’en 1765, le jeune castrat soprano Luca Fabbris (créateur de Merione dans Il Telemaco de Gluck la même année), faisant l’effort d’atteindre une note extrêmement aiguë et absolument exceptionnelle, s’abattit sur scène et mourut, à la grande consternation du compositeur Guglielmi qui l’avait encouragé à tenter l’exploit.

 

Citons aussi Metastase, écrivant de Vienne à son « Caro gemello », après une représentation du Re Pastore de Gluck en 1756 : « le premier soprano est monsieur Mazzanti, grand joueur de violon en fausset ; il ne manquera pas d’admirateurs, car nous avons des palais pour toutes les sauces. Moi, quand j’entends chanter, je ne me satisfais pas de n’être qu’ébahi, je veux que mon cœur prenne sa part au bénéfice des oreilles. Mais c’est là une science qui n’est accordé qu’à un petit nombre ; et la nature ne fait pas fréquemment l’effort de produire des Farinelli ».

 

Le même Metastase soulignait encore dans une lettre à Mattei de 1770 que les chanteurs « au lieu de s’employer à rendre leurs voix fermes, robustes et sonores, s’appliquent à les faire devenir légères et flexibles. Cette nouvelle méthode a permis d’atteindre à cette prodigieuse vélocité de gorge qui surprend, et exige de bruyants applaudissements des spectateurs. Mais une voix amoindrie, et par conséquent affaiblie dans les arpèges, dans les trilles et dans les volate, peut bien causer le plaisir qui naît de l’étonnement, et doit être précédé d’un syllogisme ; mais jamais cet autre qui est immédiatement produit par la vigoureuse impression physique d’une voix claire, ferme et robuste, qui ébranle avec une force égale à la jouissance les organes de notre ouïe et en pousse les effets jusqu’à les faire pénétrer dans l’âme .» 

 

Remarquons au passage que l’on a trop souvent le tort de faire de Métastase le chantre d’un opera seria sur-orné, vide de sens et de sentiments, face à un « pur » opéra réformé alla Gluck et Calzabigi.

 

Les Français, prompts à condamner l’art vocal italien, ne manquaient pas de souligner l’extrême légèreté, souvent un peu creuse, des chanteuses italiennes, surtout comparées aux grandes tragédiennes françaises, d’une tout autre densité vocale et dramatique, mais à la technique parfois bien défaillante ! 

 

Sur ces constats, avouons tout de même que de bien belles œuvres ont pu naître à cette époque, passionnante à plus d’un titre. De très grandes cantatrices ont su se faire une place dans le panthéon des rossignols suraigus, certaines louées pour leur art complet de virtuose époustouflante et de tragédienne, d’autres stupéfiantes par leur technique mais moins convaincantes en scène.

 

Une discographie nous permettra de voir si nos interprètes actuelles, dans ces parties très exigeantes, sont capables d’ébranler « avec une force égale à la jouissance les organes de notre ouïe .» 

 

 

Grandes prime donne aiguës du 18ème :


 

Caterina Gabrielli (1730-1796)


 

Cette immense cantatrice est une des plus connues de son siècle, et sans doute la plus fêtée de son époque. On peut aisément trouver des descriptifs très détaillés de sa carrière, et surtout les nombreuses anecdotes qui émaillèrent sa vie, dues à son esprit libre et son caractère fantasque, qui choqua ses contemporains. Elle fut exclue de plusieurs villes italiennes pour « mauvaise conduite » !
O
n suppose qu’elle débuta vers 1754, probablement dans un second rôle de l’Antigona de Galuppi à Venise. Prenant conseil auprès de Porpora, un des plus prestigieux maître de chant, elle poursuit une carrière vite brillante qui l’amène à Vienne où elle chante des œuvres de Gluck (L’Innocenza Giustificata, L a Danza , Il Re Pastore, Tetide) entre 1755 et 1760. Metastase, dès 1755, la décrit comme « l’astro novello del cielo musicale ». Elle parcourt toute l’Italie : Lucques, Turin, Milan, Naples, Rome, Venise, Palerme… En interprétant les meilleurs compositions de l’époque, signées Sacchini, Hasse, J.C. Bach, Piccinni, Jommelli, et ses compositeurs de prédilection : Traetta, et Myslivecek. Elle fera un passage remarqué à St Petersbourg, où elle défie Catherine II par ses prétentions financières immenses et son effronterie. Elle enchante aussi dans les rôles que Traetta lui écrit là-bas : Antigona, Lucio Vero, Amore e Psiche… 
M
ozart l’entend en fin de carrière, en 1778, et en tire des commentaires perfides. Mais il avait en tête une autre soprane, du nom d’Aloysia…
Elle finit ses jours à Rome, dans l’opulence, après son retrait des scène en 1782.
Sa voix était d’une virtuosité sans faille, stupéfiante, avec des capacités d’improvistion à la hauteur des grands chanteurs de l’époque. Les parties écrites pour elles ne présentent pas, pour ce que j’en connais, beaucoup de suraigus, mais il exige un aigu facile et souple, et l’on peut supposer que c’est dans l’ornementation qu’elle faisait valoir ce registre : Lalande, dans son Voyage en Italie, lui prête une étendue du si bémol 3 au la5 (contre-la) !

 

Anna De Amicis (1733-1816)

 

Son nom est connu des amateurs mozartiens pour avoir été la première interprète de Giunia dans Lucio Silla. C’est sans doute pour cette raison qu’il est également aisé de trouver des informations précise sur cette chanteuse, très fêtée en son temps. 
Elle débuta assez tôt en troupe avec ses parents, chantant dans des opéras bouffes à Paris, Amsterdam, Bruxelles, en Italie, en Irlande. Le tournant de sa carrière viendra avec la création des opéras Orione et Zanaide de JC Bach. Elle restera fidèle au genre seria. 
Elle aussi interprète Myslivecek, Anfossi, Galuppi… Lorsque, à l’occasion du mariage de l’archiduc Leopold, elle crée Romolo ed Ersilia de Hasse sur un livret de Metastase, ce dernier la couvre de fleurs.
La De Amicis partage surtout sa carrière entre Milan, Naples et Venise. Une complicité particulière la lie au compositeur Jommelli, qui lui écrit de nombreux rôles, et c’est d’ailleurs dans Armida Abbandonata de celui-ci que Mozart découvre sa future Giunia.
Léopold et Wolfgang, à l’occasion de cette collaboration, se pâment : « Dans son grand air, Wolfgang lui a donné des passages très nouveaux et d’une difficulté insensée ; elle chante merveilleusement et nous sommes aussi amis que possible avec elle », puis « La De Amicis est notre meilleure amie ; elle chante et joue comme un ange .» L’air en question est “Ah se il crudel periglio” ; le succès est considérable.
En fin de carrière, à Bologne, elle participe à la première en Italie de l’Alceste de Gluck, ce qui implique certainement des libertés avec la partitions…Elle se retire l’année suivante.
Son art fut unanimement admiré, et les rôles qui restent témoignent de ses capacités techniques et de ses spécificités : Burney, un des témoins les plus renommés et sévères de la vie musicale de l’époque, affirme qu’elle fut la première à introduire dans son chant les staccate colorature (échelles de notes piquées). Effectivement, on retrouve ces figures dans l’Armida abbandonata de Jommelli (“Odio, furor, dispetto”), reprises par Mozart (“Parto, m’affretto” dans Lucio Silla).
Ces figures en notes piquées seront la marque de fabrique des sopranes aiguës de l’époque, et permettent d’atteindre des notes très aiguës sans avoir à les tenir ou les pousser en force, ce qui respecte l’esthétique belcantiste.
Mozart, par exemple, reproduit ses éléments virtuoses dans des airs de concerts (il fit travailler “Parto, m’affretto” à sa chère élève Aloysia Weber), ou pour la Bernasconi dans Mitridate (“Nel grave tormento”).


Lucrezia Agujari (1743-1783)

 

Ses origines illégitimes lui durent l’encombrant surnom de « la bastardella ». Elle débute en 1762 à Florence, puis se produit dans plusieurs autres villes italiennes. Pour le prestigieux mariage du roi Ferdinando IV à Naples, elle chante dans Peleo e Tetide de Paisiello, triomphant d’airs effroyablement difficiles. Elle participe aux Feste d’Apollo de Gluck, ou le castrat Millico interprète l’Orfeo, couplé avec Bauci e Filemone et Aristeo. Elle rencontre le compositeur Colla, artiste mineur, avec qui elle entretient une relation amoureuse, et qui sera dorénavant son compositeur attitré. Très active dans les années 1770, elle vient stupéfier le public parisien au concert spirituel en 1774, et se produit pour des fortunes au Pantheon Concerts de Londres. On en parle beaucoup à cause de la forte impression qu’elle fit sur Mozart, qui l’entendit en concert le 24 mars 1770, à Parme, et nota l’étendue extraordinaire de sa voix, du sol2 au do6 (contre-contre-ut) : il note « C’est la fameuse Bastardella qui possède premièrement une belle voix, deuxièmement un gosier galant, troisièmement une élévation de voix incroyable » et de retranscrire une cadence de plus de vingt mesures qu’elle chanta en sa présence, avec trilles en échelle du contre-ut au contre-fa, et vocalises enchaînées du do3 au do6.
Léopold trouva ces passages « aussi beaux qu’un son d’orgue.»
Néanmoins, la perfide française Sarah Goudar notait sévèrement « l’Agujari est le rossignol de la scène, mais n’est qu’un rossignol. Son chant exprime peu dans sa brillante exécution. Elle frappe d’abord par des accents étrangers à la nature, qui ramènent trop souvent des sons aigus. On l’appelle la Bastardina (sic), nom qui lui convient, car il n’y a rien de légitime dans sa musique ; tous ses airs sont bâtards !» Burney, pour autant, confirme les qualités vocales de la chanteuse, mais aussi son manque d’expressivité, plus virtuose que musicienne.
Elle meurt à seulement quarante ans, de la tuberculose.


Gertrude Elisabeth Mara née Schmeling (1749-1833)

Fille d’un violiniste, elle souffre d’être exposée très jeune comme prodige de cet instrument, et en garda une santé vacillante. Etudiant finalement le chant, elle parfait son éducation en Angleterre et Allemagne. Là, elle récolte ses premiers succès, ainsi que des vers admiratifs de Goethe. Elle s’impose dans les ouvrages de Hasse et Graun à l’opéra royal de Berlin, sous la férule implacable de Frédéric II, où elle épouse le violoncelliste Mara. Il lui fallut maints caprices et ruses pour d’une part, obtenir la permission de ce mariage, d’autre part pouvoir enfin quitter Berlin et briller dans d’autres ville allemandes et autrichiennes. Mozart l’entend sans enthousiasme en 1780, à Münich. 
Nous gardons de nombreux témoignages de son passage en concert aux fameux concerts spirituels de Paris, avec notamment une description précise dans « Le Mercure » de 1782 : « Mme Mara est en effet étonnante par l’étendue de sa voix qui a presque trois octaves et par sa souplesse et sa hauteur ; elle s’élève à l’octave de sol et s’élance avec justesse des sons les plus graves aux sons les plus aigus .» Si sa virtuosité ne fait aucun doute, la qualité d’émotion de son cantabile laisse les auditeurs plus partagés.
Puis, se rendant à Londre, Mara se produit aux Pantheon Concerts, avec rien moins que le castrat Pacchierotti, puis sur scène a King’s Theatre. Elle participe aussi au festival Haendel de Westminster, interprétant la Cleopatra de Giulio Cesare. Son style dans Haendel, compositeur quasi officiel et fort respecté, est généralement loué – que dirait-on aujourd’hui ? Rejoignant la troupe italienne, elle ne néglige pas pour autant les ballads opera de Storace, renforçant sa popularité : elle y reprit même The Beggars’ opera, alors meilleur moyen de se faire aimer du public de Londres toujours féru de cette pièce. Elle y soutient la comparaison avec l’immensément populaire Billington, ou Mlle Crouch, de même que dans le rôle de Mandane d’Artaxerxes.
Ses activités centrées à Londres ne l’ont pas empêchée de se produire sur le continent, où elle s’établira après avoir laissé Brigida Banti conquérir le théâtre italien en 1791. Elle finit bien mal sa vie en Estonie, en 1833, non sans une triste tentative de retour au King’s Theatre en 1820, alors qu’elle était réduite à donner des leçons de musique pour vivre. Goethe avait tout de même eu le temps d’honorer son art une fois de plus, dans le poème « Sangreich war dein Ehrenweg  ».


Francisca Danzi-Lebrun (1756-1791)

 

Cette artiste née à Mannheim sous le nom de Danzi est une des cantatrices saillantes de son époque, mais aussi compositrice de sonates. Elle étudia le chant avec les artistes locaux, non des moindres, et notamment Dorothea Wendling. En outre l’abbé Vogler lui enseigne la composition. À seize ans, elle débute dans La Contadina in corte de Sacchini à Schwetzingen, puis à Mannheim. Elle y créera le Günther von Schwarzburg d’Holzbauer en 1777. Sa carrière passe aussi par Londres, centre musical incontournable à la fin du XVIIIème : c’est là qu’elle rencontre et épouse en 1775 le hautboïste virtuose Ludwig August Lebrun, également compositeur. Tous deux se produisent souvent en concert, mêlant avec art voix et instrument. En 1777 elle chante avec le ténor Adamberger au King’s Theatre, et en 1780 participe à un concert de gala au bénéfice du célèbrissime castrat Pacchierotti, avec qui elle interprète des extraits de L'Olimpiade mis en musique par divers compositeurs, soirée décrite dans le détail par Susan Burney. Elle prend part, avec la Balducci , à l’ouverture triomphale de la Scala dans l'Europa Riconosciuta de Salieri en 1778, où elle interprète la reine Semele, et participe aux autres productions de la saison toujours avec Balducci et/ou le castrat Rubinelli. De là commencent ses succès italiens, sans oublier Münich, Londres... 
En 1789, elle est invitée par Reichardt à Berlin, mais son époux décède de façon inattendue, ce qui sera un coup dont elle ne pourra se remettre, malgré le soutien de son public de toujours à Mannheim, où Carl Theodor lui assure de quoi subsister. Elle suit son mari dans la mort en 1791.
Les rôles de soprano dans Europa riconosciuta de Salieri sont également exigeants. Virtuose parfaite, suraigus aisés… Sa spécialité, remarquées dans les témoignages au disque de ses créations, était bien entendu de chanter avec l’accompagnement soliste de son époux : dans chaque opéra, la Danzi-Lebrun interprétait un air avec hautbois obligé, que ce soit “Quando irato freme” dans Europa, ou “Mi sento Oh Dio ! Nel Core” de L’Olimpiade de Cimarosa, “Der glänzende Himmel” de Günther von Schwarzburg ou dans La Clemenza di Scipione de J.C. Bach. Avec des incursions attendues dans le suraigu, où l’instrument ne peut pas suivre. Le public savait bien qu’il s’agissait d’une interprétation « conjugale », et raffolait de ce genre d’effet.

 

 

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29 août 2006 2 29 /08 /août /2006 20:40

Sonia Prina, la Freddie Mercury du baroque

 



Article entièrement mis à jour ici et .

Je laisse cette ancienne version à disposition uniquement pour conserver les commentaires rédigés par les lecteurs de ce blog.





Voici enfin cette présentation que je vous promets depuis longtemps sur la grande Sonia. La dame fait débat parmi les baroqueux, on lui reproche sa tessiture limitée pour des rôles de contralti, on encense son timbre et son energie. Un baroqueux éminent a qualifié sa voix de "moustachue", la comparer à Freddie Mercury m'a alors semblé évident! ;-) Encore une fois je ne connais que peu de détails biographiques: diplomée de chant et de trompette (comme Tchétchilia si je ne m'abuse) à 19 ans, elle est admise au sein de l'académie lyrique de la Scala. Elle a aujourd'hui la petite trentaine. Le plus interessant réside bien sur dans ses prestations. Si sa tessiture limitée lui interdit bien des roles de castrats, elle fait merveille dans les roles de mezzo coloratures qui lui permettent de jouer pleinement de son timbre rond et chaud. Le cas des rôles de contralto traduit son intelligence musicale, puisqu'elle pallie souvent des lacunes dans l'aigu et le grave et transcende certains trucages (tendance à bramer) par un enthousiasme et une energie théatrale débordants; au final on est bluffé et impressionné par cette voix qui en impose alors même qu'elle n'a rien d'exceptionnel. Les titres soulignés signalent les enregistrements et live à écouter en priorité.

 

Discographie:

 

*Donizetti, Anna Bolena (Smeton)
Theodossiou, Ganassi

 

pas entendu, mais le role est riquiqui

 

 

*Handel, Lotario (Matilde)
avec Mingardo, Summers, Kermes, Priante
dirigé par
Curtis

 

Dans ce premier rôle composé par Handel pour la Merighi en 1729 (juste avant Rosmira), Prina est très à l'aise, du coup son talent peut se deployer dans les airs délicats où le moelleux de son timbre est plus que le bienvenu ("Vanne a colei che adori") comme dans les ceux plus enlevés ("Quel superbo già si crede"), mais aussi surtout dans les scènes dramatique ("Arma lo sguardo", scène de la prison) et de fureur (magnifique "Furie del crudo Averno").
Mais bon, la partition n'est pas la plus réussie de Handel et Curtis est en pilote automatique, le tout baigne donc dans une certaine apathie dont nos grandes chanteuses (Mingardo, Summers, Prina) se detachent à grand peine...et Kermes caracole dans l'aigu, c'est tout ce qu'elle sait faire.

 

 

 

*Handel, Il Trionfo del tempo e del desinganno (Disinganno)
avec Dessay, Hallenberg, Breslik
dirigé par Haïm

J'attendais ce disque avec impatience: mes deux mezzo coloratures favorites réunies, un des meilleurs ténors baroques actuels, de très bons échos du concert du TCE et Natalie en cerise sur le gateau. Malheureusement paru quelques jours après le concert de Minkowski à Pleyel, je ne peux cacher ma deception. Comme souvent, Dessay est à coté de la plaque dans Handel eet le Concert d'Astrée fait vraiment office de second choix quand on a entendu la splendeur des Musiciens du Louvre. Prina n'est pas très à l'aise ici, son "Crede l'uom" n'est pas aussi habité qu'au concert et son energie ne peut se déployer dans un rôle tout en rennoncement. Cela reste du très bon niveau, mais la cohérence dramatique de l'ensemble fait vraiment défaut à ce disque et nuit à ses interprêtes.

*Handel, Rodelinda (Edwige)
avec Mijanovic, Lemieux, Priante, Kermes
dirigé (le terme est un peu fort!) par Curtis

 

Beaucoup en ont fait la cruelle expérience, c'est sans doute le pire disque du tandem Kermes/Curtis. Prina est ici assez decevante, ses vocalises sont alignées sans rechigner mais on la sent bridée par la platitude de l'orchestre qui encore une fois ne semble fait que pour soutenir les suraigus de Kermes; de toute façon, tout le monde ici patauge: Mija est perdue faute d'être accompagnée par l'orchestre, Lemieux a un trop petit role pour marquer, Priante ne se donne pas plus que ça et Kermes:cui cui cui, non pardon :ui ui ui! Passez votre chemin.

 

 

*Handel, Alcina (Bradamante)
avec Kasarova, Cangemi, Harteros, York
dirigé par Bolton à Munich

Voilà encore un rôle de pure contralto (la Negri aussi créatrice de Polinesso et Carilda), donc, bien sur, trop grave pour Prina, mais bon il est vrai, comme le dit quelqu'un ici que presque tous les rôles sont soit trop graves soit trop aigus pour Prina, donc je vais arrêter là pour ce poncif la concernant. Le fait est que Bradamante souffre d'intêrprêtes à la fureur relative et aux vocalises dont la vélocité sacrifie à la clarté du timbre ou l'inverse: Mijanovic s'y englue, Podles y fait vraiment trop mémère, Kuhlman est bien sage, Sinclair - héhé! j'avoue que j'aimais bien quand j'ai découvert l'oeuvre et le baroque, mais bon... -, Wolak impossible, je n'y connais pas Mingardo. Tandis que Sonia avec une voix inadéquate réussi la meilleure caractérisation du rôle, certes les vocalises manquent d'ampleur, mais la projection et le souffle sont loin d'être pris en défaut; quant à la rage du personnage, tantot contrainte dans le "E gelosia" à mots couverts, tantôt déchainée dans le superbe "Vorrei vendicarmi", elle est fulgurante. Le dernier air (un peu chiant à mon gout) est tout à fait maitrisé, mais de toute façon presque toutes les interprêtes du rôle le réussisse honnêtement.

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*Galuppi, Il Filosofo di campagna

 

connais pas

*Monteverdi, L'Orfeo (Speranza)
avec Bostridge, Ciofi, Coote, Dessay, Gens, Sampson, Agnew, Regazzo
dirigé Haïm

Encore un des plus gros ratages de ce début de siècle. Prina est tout à fait honnête en Speranza mais le role est un peu trop court.

 

 

 

*Porpora, Salve Regina
dirigé par Dantone

Prina dans la musique sacrée est absolument fabuleuse, cette première incursion le prouve amplement (le disque est malheureusement épuisé). Avec un Dantone exhaustif et spirituel, ce Salve Regina est boulversant et rend à Porpora sa place préeminente parmi les compositeurs du 18ème siècle. Naturellement la sensibilité, la douceur, le moelleux, la profondeur d'expression de notre Sonia font ici miracle, et sa prononciation donne une saveur inconnue au latin. A la delectable et confiante serennité du "Salve regina" succède l'humble prière du "Ad te clamamus" dont l'insistance trouve cependant refuge dans les vocalises qui s'interrompent brusquement comme s'apercevant de l'excès d'orgueil qu'elle portent. C'est le moment d'un "Eia ergo"extasié et pourtant plein de doute, de piété et d'effacement dans la douleur apaisée par la foi, comme si l'enthousiasme tentait de nier l'imparfaite confiance humaine en Dieu . Et le tout s'acheve avec un boulversant "O clemens" qui vogue confiant dans un murmure et une legereté en harmonie avec des vocalises rondement menées et une diction toujours aussi délicieuse. Alleluia! Et encore je ne vous detaille pas toutes les parties... Tentez à tout prix de denicher ce bijoux de Sancta Sonia!!

 

*Rossini, La Cenerentola
avec Florez, Ganassi, Ulivieri
dirigé par Rizzi

pas entendu

 

*Sammartini, Maria addolorata & Il Pianti di San Petro (Cleofe et Giacomo)
dirigé par Ferrari

Très bien dirigées, ces oeuvres de Sammartini sont assez interessantes même si elles manquent un peu d'inventivité. Sonia n'a que deux airs "Almen potesse chiudere" de Cleofe dans Maria addolorata et "N'empie d'orrore" dans Il Pianto di San Pietro. Le premier est une longue (12 minutes) lamentation concertante avec violoncelle, autant dire tout de suite que l'harmonie entre sa voix et le violoncelle est totale, l'epuisement et la lassitude sont sensibles, jamais je ne l'ai entendue si émouvante. Le second est aussi une sublime lamentation qu'elle rend à merveille. Elle est vraiment douée pour rendre toute la spiritualité de cette musique à travers son timbre charnel qui pointe vers l'invisible, l'indicible, l'absolu divin, le mystère sacré. Elle s'y entend en art de sublimer la souffrance humaine: écoutez comme elle appuie la dernière syllabe de ses "crudelta" et "oppresso" tels les premisses de larmes que la pudeur retient, puis varie les intonations à chaque reprise de cette mélancolique et trébuchante litanie qu'elle traverse d'un souffle chantant.

 

 

*Sarti, Giulio Sabino (Guilio Sabino)
dirigé par Dantone

Témoignage interessant de notre toute jeune Sonia: ça cafouille un peu, les vocalises ne sont pas toutes très bien placées et le rôle est un peu trop aigu pour elle (le créateur était un castrat soprano). Reste une bonne prestation, parfois touchante et souvent osée (elle ne se ménage pas dans les variations!), mais ce n'est pas inoubliable; de plus Dantone est encore loin de diriger avec la magie qu'on lui connait aujourd'hui. Le tout donne une bonne idée de l'oeuvre, mais reste encore trop timoré à mon gout.

 

*Verdi, Messa solenne
avec Scano, Florez, Gallardo-Domas
dirigé par Chailly

conèpanonplu

 

 

 

*Vivaldi, Orlando finto pazzo (Origille)
avec Bertagnolli, Custer, Comparato, Oro, Pizzolato
dirigé (magnifiquement!) par de Marchi

Voilà un superbe opéra archivénitien, dans lequel Prina s'épanouit à merveille! L'air du premier acte la montre sous son meilleur jour, et on admirera à quel point cela sonne rond sans pour autant sacrifier la diction. L'acte 2 la voit encore plus belle dans un superbe air avec echo à travers lequel son péché mignon ailleurs, les vocalises un peu engorgées, disparait totalement; le second ne traduit pas moins son sens du souffle, ou comment distiller son texte avec science en se melant parfaitement à l'orchestre. L'acte 3 la voit triompher dans le celèbre "Andero, volero, gridero" où elle est plus consistante que Bartoli, mais aussi moins incisive; cela paraitra sans doute un peu trop enflé pour certains, mais j'adore, le da capo la trouve un peu limite dans la tessiture mais elle sait jouer habilement pour que cela ne paraisse pas. Les deux interpretations se valent pour moi, Bartoli m'evoque plus le raz-de-marée, Prina la haute mer qui enfle et les vagues qui meurent comme elles sont nées;  par ailleurs ici le soutien de l'orchestre me semble plus idoine que celui du Giardino armonico, un peu trop napolitain. Bref je recommande chaudement; les autres interprètes, même s'il ne sont pas tous parfaits offrent pour beaucoup de superbes moments.

 

 

*Vivaldi, L'Olimpiade (Aristeo)
avec Invernizzi, Mingardo, Foresti
dirigé par Alessandrini

C'est graçe à ce disque que je l'ai découverte: son "E troppo spietato" est un de mes airs de Vivaldi préférés, diction exemplaire, rondeur de la note, vocalise nettes, orchestre foisonnant à souhait... seul défaut, c'est un peu sage; aujourd'hui, quatre ans après, je pense qu'elle s'y lacherait bien plus, mais après tout Aristea est un personnage bien moins tourmenté que Megacle ou surtout Licida. Elle est idéale pour "Sta piagendo la tortorella" qu'elle rend avec une triste délicatesse et un résignement gracieux qui conviennent parfaitement à Aristea; "Tu da me dividi" lui permet de faire montre de son superbe art de la déclamation, qui vient masquer un grave insuffisant. "Caro son tua cosi" est aussi un beau moment, j'adore l'élégance avec laquelle elle lance ses "rise e e e e e e ento", et oui Clément, je la trouve féminine surtout quand elle allege sa voix en fin de phrase, cette évanescence de la voix sur le "anchio" me ravit littéralement. A part Giordano qui n'a pas comprit que son role était travesti, le reste de la distribution et l'orchestre sont sublimes (surtout Mingardo et Invernizzi). Un des plus beaux disques d'un opéra de Vivaldi. A acquérir de toute urgence.

 

 

*Vivaldi, Farnace (Pompeo)
avec Mingardo, Zanasi, Banditelli, Fernandez, Forte
dirigé par Savall

Si la distribution ne fait guère réver, si le rôle de Mingardo n'est pas à la hauteur de sa splendeur, si Zanasi est bof, et que Banditelli se demande toujours autant où elle est, ce disque vaut pour la belle direction de Savall qui manque de netteté mais pas de couleurs et pour le Pompeo de Sonia! C'est enooooorme! En deux airs elle écrase le reste de la distribution. L'illustre "Sorge l'irato nembo" est à mon sens le plus beau jamais enregistré, Savall va à toute vitesse et soulève les éléments, Prina le suit à la même allure, imperieuse . Au second acte, un air idoine pour sa voix qui lui permet de nuancer sa prononciation de façon limpide et intelligente au grès des reprises du texte avec de beaux graves qu'on ne lui connaissait pas encore. Elle signe les deux meilleurs moments du disque et je prie pour qu'elle le chante l'an prochain à Pleyel. La prise de son par ailleurs assez ample rend pleinement justice à l'impression qu'elle laisse sur le public dans la salle et à sa glorieuse projection. Il faut bien avouer à ce propos que je n'ai toujours pas compris comment une tessiture assez moyenne pouvait donner une impression si abyssale.

 

 

*Vivaldi, La Senna festeggiante (La Virtù)
avec Lascarro, Ulivieri
dirigé par Alessandrini

 

Encore un role vivaldien où triomphe son style et son timbre à la douceur de pêche. "In quest'onde" envoutant avec des envolées maitrisées dans l'aigu plus que convaincantes (et qui feront mouche dans la Partenope de Handel); "Vaga perla benche" à la hauteur de sa prestance, une grande classe au dessus de tout reproche, que rever de mieux pour la Vertu, encore une fois je ne saurai expliquer par quel miracle sa voix se mêle si bien aux volutes de l'orchestre, mais sans doute est-ce le fait de mon hypersensibilité à son timbre. "Stelle, con vostra pace" la trouve touchante dans un lamento où elle est plus délicate et féminine (j'insiste!) que jamais (un peu comme pour son "Crede l'uom"); et puis des chanteuses capable de marrier si bien mordant et densité du chant sont rares. "Cosi sol nell'aurora" lui permet de virevolter de façon envoutante sans être trop capiteuse façe à un orchestre qui sautille discretement, et quelle façon de faire mourir ses phrases encore une fois, quel style: magnifique! Lascarro est un peu dure cependant, donc ne pas négliger la version King avec une meilleure Sampson et Hilary Summers excellente aussi mais qui n'a pa ma préférence.

 

 

 

 

Lives diffusés à la radio:

 

 

 

 

*Handel, Messiah
avec Priante, Scano
dirigé par
Biondi à Madrid

A oublier; Biondi est incapable de maitriser l'orchestre (un espagnol je crois, en tout cas pas Europa Galante) et de donner une conception claire et structurée de l'oeuvre; tout le monde chante un peu n'importe quoi: à Prina echoient le "But who may abide" et le "He was despised". Bien sur son cantabile est très efficace dans le second, mais on l'a connu plus émouvante; le premier air par contre gagne vraiment à être interprété par un mezzo plus aigu (Kozenaaaaaaaaaa!!!).

 

 

 

*Handel, Il Trionfo del tempo e del desinganno
avec Hallenberg, Breslik, Cangemi
dirigé par Haïm au TCE

Je ne connais pas la retransmission radio en entier; une bonne âme internaute a porté à ma connaissance le "Crede l'uom" et le "Voglio tempo". Le premier est formidable, c'est le terrain de prédilection de la dame; l'interprétation gagnera beaucoup à mon avis dans l'intimité du studio (edit: je m'a bien gouré sur ce point!). Le second est angoissant à souhait, le manque de respiration chronique du Concert d'Astrée étant ici une qualité pour rendre l'ambiance carcérale et nerveuse de ce quatuor qui respire, ou plutôt expire, l'urgence tragique.

 

 

 

*Handel, Partenope (Rosmira)
avec Schiavo, Auvity
dirigé par
Florio à Beaune

avec Invernizzi, Auvity
dirigé par Florio à la Vilette

Rosmira est à mon sens un de ses meilleurs roles; écrit pour la Merighi, une mezzo colorature, le rôle traverse tous les états d'âme: fureur ("Un altro volta ancor" délirant grace à la combinaison de fortes scansions sur "poi..." auquelles succède un court silence angoissé puis reprises du "poi" et tourbillon vocalisant sur "m'inganasti"), superbe guèrriere ("Io seguo sol fiero", glorieuse gigue dans laquelle Prina crane fièrement en dialoguant avec le cor, faisant montre de graves que je ne lui connaissait pass), jalousie ("Furie son dell'alma mia", même procédé que pour le premier air, avec une forte accentuation du "gEElosia" puis "gelosia rabbia e furor" et vocalise sur "rabia", avec un staccato des archets sur chaque syllabe initiale; l'air parcoure une large tessiture et Prina décoche des aigus tous neufs là aussi), mais aussi tristesse avec de superbes lamenti. Bref un rôle en or! J'étais ressorti emerveillé du concert de la Vilette (avec en plus une Invernizzi stellaire), tandis que le live radio de Beaune souffre d'une reverberation excessive. A connaître absolument!!

 

 

 

*Handel, Amadigi di Gaula
avec Invernizzi
dirigé par
Alessandrini à Beaune

connais pas! pour mon plus grand malheur :-(((((((((

avec Pondjicils
dirigé par Alessandrini à Naples

Ben là par contre ce n'est pas ce que l'on fait de mieux en la matière: elle ne se donne pas à fond et en devient commune, l'orchestre est vilain que ça en est insupportable, on se croirait à Halle dans les années 50.

*Handel, Rodelinda (Bertarido)
dirigé par Curtis à Londres

Faut que j'écoute, mais bon Curtis dans Rodelinda, j'ai déjà été traumatisé par le disque...

*Handel, Giulio Cesare (Cesare)
avec Cencic, Comparato, Remigio
dirigé par Fasolis à Gênes

Attention: OVNI! La partition a été entièrement tripatouillée (et vu le dramatisme foireux de cet opéra, je ne m'en plains pas!), l'instrumentation aussi visiblement (sorte de corne de brume bouchée dans les récitatifs!) et Prina en Cesare on pouvait craindre le gros plantage! Finalement c'est une très belle réussite pour elle que j'ai rarement entendu aussi en forme (du coté de ses modifications: son "Qual torrente" lui est ravi par Cornelia et elle récupère le "Se tu consenti" d'Orlando): vocalisation à toute épreuve ("L'empio diro" est le plus rapide que j'ai jamais entendu!), souffle long, niaque dramatique, timbre charmeur ça dépote!

 

*Handel, Giulio Cesare (Cornelia)
avec Joshua, Scholl
dirigé par Rousset à Paris

Passé un magnifique premier air et un sublime duo avec Sesto, le role ne lui offre guère l'occasion de briller, son manque de graves abyssaux faisant vite oublier ses airs malgrè des récitatifs très animés.

*Handel, La Resurrezione
avec Joshua, Bell, Agnew
dirigé par Haïm à Francfort

Je n'ai malheureusement pu enregistrer que des bribes de ce concert: dépatouillage in progress.

 

 

 

*Mozart, Ascanio in Alba (Ascanio)
avec Damrau à Salzbourg
(sorti en DVD)

Bof, bof, le rôle n'est pas terrible, elle est juste honnête et la mes devait sans doute lui donner suffisamment de fil à retordre comme ça.

 

*Pergolesi, L'Olimpiade (Alcandro)
avec Bonitatibus
dirigé par Dantone à Beaune

Un rôle très court, un seul air dans lequel elle est excellente: émouvante, juste, délicate, on est sur un petit nuage, c'est presque trop pour ce messager.

 

 

 

*Pergolesi, Il Flaminio
avec Invernizzi, Bonitatibus
dirigé par Dantone à Beaune

Un petit rôle encore dans lequel elle marque moins que Bonitatibus déchainée. L'oeuvre est magnifique, donc à découvrir de toute façon, mais pas forcément pour Prina.

*Rossini, La Pietra del Paragone (Clarice)
avec Lis, Zappatta
dirigé par Spinosi à Paris

Dans Rossini les limites de sa tessiture ne pouvaient que ressortir: malgrè des efforts louables pour assumer les descentes dans le grave et les surgissement dans l'aigu, sa vocalisation est ici trop véloce, trop légère, pas assez martelée pour du Rossini qui réclame plus de poids. Son art du phrasé n'est d'aucune utilité ici, heureusement sa veine comique sauve sa prestation et rend le tout agréable à défaut d'historique.

 

 

 

*Scarlatti, La Vergine dei dolori (la Vierge)
avec Invernizzi, Basso
dirigé par
Biondi à Vienne

Prina en vierge Marie, c'est le paradis, la chaleur et la douceur du timbre en plus, même si l'on peut préférer la douleur plus introvertie de Mingardo (concert à Paris), cette Vierge là ne passe pas inaperçue et fait de sa voix un linceul pour le corps meurtri de son fils - oui je sais ça veut rien dire et ça fait sulpicien. Ecoutez donc au lieu de me lire!

 

 

 

*Vinci, Partenope (Partenope)
avec Ercollano, Schiavo
dirigé par Florio à Beaune

Un autre de ses grands rôles, la guerrière et mythique reine de Naples. L'applomb nécessaire au role ne fait pas défaut (ça non!!), les vocalise manquent encore un peu de précision, mais la caractérisation marque encore une fois, à tel point que c'est dans ce rôle qu'il faut chercher l'origine de l'adjectif "moustachue" dont Clément a gratifié sa voix: il est certain que "Cade mura" manque un peu de féminité :-) mais bon c'est la faute à la superbe et archirythmée partition de Vinci aussi (tellement rythmée que je l'utilise souvent pour me booster quand je fais de la muscu! c'est mille fois mieux que Véronique et Davina! mais je m'égare...). 

 

 

 

*Vivaldi, La Griselda (Griselda)
avec Cangemi, Staskiewicz, Jaroussky, Ferrari
dirigé par Spinosi au TCE

Une autre vision du rôle, plus torturée et moins délicate que celle de Lemieux au disque. Le rôle y perd en subtilité mais y gagne en energie combattive pour cette fille des forêts. "Ho il cor" est anthologique!! Le timbre est rond et la projection souveraine, les "fulmini" sont fulgurants (ça tombe bien!), les "mi fa tremar" un peu fragiles (là aussi ça tombe bien!) et l'articulation parfaite; et j'aime beaucoup la façon dont elle allège sa voix pour faire ressortir la féminité et la sensibilité du personnage sur le "a" de "affani" (dédicasse spéciale à vous-savez-qui!).

*Vivaldi, Airs alternatifs
dirigé par Dantone à St Michel en Triearche

Pour terminer voilà le clou du spectacle: l'Accademia Bizantina confine à la perfection dans Vivaldi, l'exact équivalent à mes oreilles du Concert Spirituel pour la tragédie lyrique ou des Musiciens du Louvre pour Handel; Prina excelle naturellement dans les airs délicats et lamentos, et pallie ses limites de tessiture par une superbe sensibilité et une vocalisation vive qui semble glisser sur le souffle sans manquer de netteté, d'où une très belle impression de naturel, de spontanéité du chant que vient soutenir sa verve dramatique habituelle. Vivement le disque qui devrait lui être plus favorable que l'acoustique seche de l'eglise de St Michel-en-trifoulli-que-même-la-scnf-elle-connait-pas!

 

 

 

Elle a aussi chanté dans

- L'Incoronazione di Poppea (Ottone) dirigée par Dantone en octobre 2005 à Crémone et à Ravenne en decembre 05 et janvier 06
- Il Ritorno di Ulisse in Patria (Penelope) toujours avec Dantone qui semble décidemment beaucoup l'apprécier en octobre 2004 à Cremone avec Zanasi

 

- La Principessa fedele (Cunegonda) de Scarlatti


- l' Oratorio di Santa Cecilia et la Santissima Trinita de Scarlatti 
- le Stabat Mater de Pergolesi
- Il Martirio di San Lorenzo de Conti
- le Gloria de Vivaldi
- Bajazet (Asteria) de Vivaldi avec Biondi, Domenech, Jaroussky, Scano, Custer et Senn à Palma de Majorque le 20 avril 2004 et à Valencia le lendemain
- l' Oratorio de Noël et des cantates de Bach
- Il Fonte della Salute de Fux à Graz 
- Aci e Galatea de Handel à Salzbourg 
- Ariodante (Polinesso) à Barcelone (mai 2006) dirigée par Bicket

- Giulio Cesare (Cornelia) à Munich en novembre-décembre 2005 dirigée par Bolton
- Rinaldo de Handel à Milan dirigée par Dantone (en alternance avec Barcellona) en avril 2005


- La Resurrezione (Cleofe) à Birmingham le 25 novembre 2004 avec Haïm, Joshua, Agnew et Bell
- Orlando de Handel avec Dantone le 20/22 février 2004 à Ravenne et le 13/15 mars 2004 à Reggio Emilia


la Seconde symphonie de Mahler
- un récital à Jesi avec Dantone en mai 2005 
- des cantates de Vivaldi (Cessate; Stabat Mater)et des airs de Handel (Empio diro; Fammi combattere) au TCE avec Antonini le 17 mai 2004

...mais je n'ai trouvé aucune trace de diffusion à la radio, si quelqu'un en sait plus qu'il n'hésite pas à se manifester: il en sera grandement remercié!

Ses prochaines engagements sont:

- Tamerlano du Bajazet de Vivaldi avec Biondi (Venise Oct07)
- Bradamante avec Spinosi à l'opéra Garnier (Déc07)
- Polinesso avec Moulds (Munich Janv08)
- Vitellia du Tito Manlio de Vivaldi avec Dantone (Londres Fev08)
- Andronico du Tamerlano de Handel à Munich avec Bolton (mes P.Audi!) (Munich Mars&Juill08)
- La Messagère et l'Espérance de L'Orfeo avec Christie (Madrid Mai08)
- Orlando de Handel à l'opéra de Sydney
- L'Enfant et les Sortilèges à Naples
- Orphée et Eurydice (Jesèpaou Jesépakan)



 

 

Le site de son agent pour vous tenir au courant.

ps: merci à Lurcanio pour les prestations et disques de Sonia qui m'avaient échappé.

 

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28 août 2006 1 28 /08 /août /2006 23:03

Bibliographie et documents :

- Une lecture aussi passionnante qu’indispensable :
Histoire du bel canto, Rodolfo Celletti - Fayard

Une somme, un ouvrage passionnant et essentiel pour saisir l'essence et le style de cette musique. 

- Version "digest" reprenant de TRES TRES près certains passages du précédent : Le Bel Canto - série Que sais-je ?, Christophe Combarieu. 

- Malgré de nombreux manques et frustrations, on trouvera de passionnantes notices dans "Dieux et divas de l'opéra" (des origines au romantisme), Roger Blanchard, Roland de Candé, chez Plon - mais il y a eu une réédition récente en un volume chez Fayard en 2004 avec moins d'illustrations. 

On y trouvera des notices détaillées sur Raaff, Ansani, Giacomo Davide, Matteo Babbini (et Giovanni Davide, Andrea Nozzari, Manuel Garcia). 

- 1001 opéras - Piotr Kaminski, Fayard. Là encore, déjà une référence.

- Numéros de l'Avant-Scène-Opéra consacrés à Alceste, Mitridate, Lucio Silla, Semele...

- Notices d'accompagnement des intégrales de certains disques (je déteste qu'on ne me détaille pas la distribution d'origine !). 

- Groves dictionnary of opera 

- Grosses Sängerlexikon, K.J. Kutsch, Leo Riemens 

Et bien évidemment mille sites internet dont je donne ici quelques adresses qui me servent souvent : 

- pour les livrets métastasiens un indice des noms intéressants, en fonction de leurs créations métastasiennes : 
http://opera.maldura.unipd.it/metastasio/nomi.jsp?lettera=a 
(malheureusement le lien a l’air mort, mais on peut parfois, lors du recherche, consulter certains pages en cache).

- Les livrets encore : 
http://www.liberliber.it/biblioteca/m/metastasio/index.htm 

- Celui-ci, je l'adore : 

On y retrouve les informations publiées au début des livrets édités suite aux représentations, avec la distribution. Une somme passionnante avec un outil de recherche. 
http://microformguides.gale.com/BrowseGuide.asp?colldocid=2054000&Item=&Page=1 

- Ne pas oublier l'excellent 
http://www.haendel.it/ 
Avec des portraits et des parcours extrêmement précis pour certains castrats et cantatrices (Caffarelli par exemple).

-Celui-ci est bien aussi, pour les chronologies, même si tout n'y est pas, bien évidemment!
http://www.operone.de/

-En allemand, nombreuses notices sur les artistes actuels et d’autrefois : 
http://www.operissimo.com 

- Assez complet, avec beaucoup d'informations intéressantes, et en français (enfin ! me direz-vous) :
http://www.operabaroque.com/ 

- Plus spécifiquement, une page consacrée à Borosini :

http://carljohengen.com/borosini.htm

 

 

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28 août 2006 1 28 /08 /août /2006 22:45

TEMOIGNAGES DIVERS : 

Les œuvres que je cite ont connu des interprètes moins prestigieux, ou dont le nom n’est pas resté en avant, mais dont l’écriture peut se révéler très belle et typique des rôles de ténor de cette époque. Le classement est ici très grossier, et avant tout chronologique.

Années 1700 – 1730 : l’ascension du ténor et la progression vers le genre napolitain

- Corrado dans la Griselda d’A. Scarlatti : le personnage est très en retrait dramatiquement et n’a qu’un seul air. Le sans doute modeste Lucchini a créé le rôle en 1721, montrant bien que la place était encore à conquérir pour les ténors à l’opéra. **

- Dans le premier opéra connu de Vivaldi, Ottone in villa, de 1713, Decio est encore un petit rôle de confident (Mark Padmore avec Hickocks ou L. Petroni avec Colusso). ?

- La Fida ninfa du même, donnée en 1732 pour la prestigieuse inauguration du théâtre de Verone, affichait un ténor dans un rôle secondaire, seulement : c’est Ottavio Sinalco qui fut le premier Narete – qui affronte tout de même des morceaux complexes. **

- En 1734, époque de la création du Catone in Utica de Vivaldi, les ténors commençaient tout juste à percer. Vivaldi confia le rôle-titre à Cesare Grandi. On peut entendre la version S. Edwards/Malgoire, ou E. Palacio/Scimone. ?

- De même, Ercole sul Termodonte en 1723 voit le éponyme confié à un ténor (comme je me proposais hasardeusement, il pourrait s’agir d’Antonio Barbieri). ?

- En revanche, dans le Farnace de Vivaldi par Savall, les airs attribués à Corselli comme tout le rôle de Vivaldi sont des transpositions : Corselli a d’abord composé son Farnace pour Caffarelli, et Vivaldi pour le contralto Maddalena Pieri – même s’il reprenait pour l’occasion un air de son Siroe…pour baryténor ! Lorenzo Regazzo s’attribue d’ailleurs l’air, lui aussi, dans son beau récital vivaldien.

- On en sait trop peu sur la serenata de grande dimension Andromeda liberata, datée de 1733, pour proposer le nom d’un ténor, d’autant que le personnage est assez secondaire. Le musicologue Michael Talbot propose, avec beaucoup de réserve un certain Biffi (moins connu, c’est le moins qu’on puisse dire, que les autres contributeurs supposés de l’œuvre : Vivaldi, Porta, Albinoni, Porpora) pour cette partie-là, par ailleurs assez centrale et exigeante. Suffisamment pour mettre Mark Tucker en difficulté, accompagné par Andrea Marcon. **

- John Elwes, qui enregistra le rôle d’Elmiro dans la version 1734 de Dorilla in Tempe (Pasticcio arrangé par Vivaldi), est distribué dans un rôle de castrat sopraniste, et n’y montre pas sous son meilleur jour…Il y a cependant bien pire dans ce disque. *

- Côté Haendel, on pourrait citer le ténor Antinori, sans doute pas à la hauteur de Borosini, Pinacci ou Fabri, puisqu’il se contenta de parties modestes dans Alessandro ou Scipione, opéras tous deux disponibles. *

Années 1740 – 1770 : l’époque galante

- Retransmission de Il Figlio delle Selve d’I. Holzbauer : (Gudbjörnsson, direction Spering), rôle de Teramene – le plus intéressant de l’œuvre, créée vers 1750. Les lamentables pitreries scéniques de la production du festival de Montpellier viennent malheureusement entacher l’interprétation musicale, notamment des cadences… **

- Gluck gagna son surnom de « divino boemo » grâce à La Clemenza di Tito, datée de 1752. Le rôle-titre fut, bien entendu, confié à un ténor, et la comparaison des airs avec la version Mozartienne est passionnante. On peut réussir à écouter la captation du concert de Langrée au Châtelet en 1996. *

- Gluck toujours : Le Cinesi fut composé pour Vienne et remanié en 1754, pour une distribution dominée par la fameuse Tesi (contralto), et avec le ténor local Friebert. Enregistré par Guy de Mey avec Jacobs.

- Son L’Innocenza Giustificata permet à A. Karasiak de chanter deux airs vigoureux. Encore une fois, sa technique et son ambitus sont trop limités pour vraiment s’imposer, mais c’est sympathique, dans un rôle destiné à Carlo Carlani, titulaire d’autres créations gluckistes (Tetide par exemple) et ancien élève du très fameux Porpora. **

- La cour de Munich accueillit le brillant Catone in Utica dans la mise en musique de Ferrandini en 1753, et Kobie Van Rensburg rend vaillamment justice à la difficile écriture du rôle titre, dont il est encore rageant de ne pas connaître le créateur. **

- Attention ! les rôles de ténors enregistrés par Jacobs dans Cleopatra e Cesare de Graun sont des transpositions, certes superbement interprétées par Robert Gambill et Jeffrey Francis. ***

- Pour ce qui est des Montezuma : celui de Graun est daté de 1755, et comporte un unique rôle de ténor, assez subalterne mais tout de même exigeant (apparemment, on ne sait pas qui était ce chanteur). On prisait avant tout les voix aiguës à la cour de Frédéric II. *

- La version de Gian Francesco De Majo, donnée 10 ans plus tard, a été proposée brillamment par Florio et son équipe habituelle. Makoto Sakurada confirme ses qualités, trop rares, dans ce répertoire : timbre assez sombre, médium et grave sonore, vocalisation correcte, accents assurés. Le rôle est d’ailleurs très exigeant, et je regrette de ne pas savoir à qui il était destiné. ***

- Les Passione di Gesù Cristo (livret de Metastasio) de Jommelli, Salieri, Myslivecek, sont disponibles au disque et proposent des rôles de ténors – et un jeu de comparaison intéressant, si on y ajoute celle de Caldara, également gravée. On peut même voir une mise en espace discrète de la version Paisiello sur le site de la RTSI (radiotélévision de la Suisse italienne), entre autres beautés. **

- On peut aussi trouver, de Hasse, un disque d’extrait de la Zenobia de 1761, créée à Varsovie, et qui propose un air de ténor tenu à l’origine par un certain Castelli. La distribution de la création ne semblait pas très prestigieuse, dans son ensemble. *

- Boccherini a aussi laissé deux œuvres traitées en « actions sacrées » : Giuseppe riconosciuto (1767) et Gioas re du Giuda. Dans le premier, Mario Zeffiri, léger mais sympathique, se défend honnêtement. Le disque, direction Handt, ne semble plus facilement disponible. Dans le second, on peut entendre Matteuzzi, type de voix assez analogue, se lancer tête baissée dans une partie à l’écriture très instrumentale, avec des traits effroyables. *

- Opéra magnifique, Antigona de Traetta présente le rôle (très important) de Creonte, créé par un certain Prati, sans doute pas mauvais du tout, vu les difficultés non négligeables du rôle. Au disque avec Carlo Allemano, Rousset. **

- Retransmission radio de la Didone Abbandonata de Piccinni (Luca Dordolo avec Florio) : Rôle d’Araspe. Donné en 1770 à Rome, l’opéra ne met pas vraiment en avant le ténor ; le triangle dramatique est plutôt centré sur Iarba-Didone-Enea : un très grand ténor aurait probablement incarné le méchant Iarba. **

- L’air « L’espoir renaît dans mon âme », version française, attribué un temps à Bertoni, est bien de Gluck, tiré de son Ezio, et probablement écrit pour un ténor à l’origine. Le passage d’Orfeo « Che puro ciel » est aussi adapté d’un air de ténor d’Ezio. On DOIT y entendre Rockwell Blake, même si Richard Croft y est fort bien, et Fouchécourt pas mal du tout. ***

Ecoutez donc « En butte aux fureurs de  l’orage » de Piccinni, par le même Blake, c’est tellement italianisant…***

- Très connu aussi, le superbe rôle de Mitridate de Mozart, composé pour Guglielmo D’Ettore. Exemple magnifique de ténor peut-être moins à l’aise dans l’agilité de bravoure (prisée par Cortoni ou Raaff), mais capable d’un canto di sbalzo d’une effroyable difficulté, sur un ambitus impressionnant ; écouter les versions de Blake, Ford, Sabbatini… ***

- Il Re pastore de Mozart : rôle d’Alessandro très virtuose, sans doute créé par Franz Aton Spitzeder, également à l’affiche de La Finta Semplice. Le second ténor, Agenore, est d’un lyrisme mozartien plus habituel. Schreier, Sacca se perdent un peu dans les vocalises et la longue tessiture du rôle : toujours un appui solide du médium et du grave exigé ! *

L’étrange Richard Conrad enregistrera un des airs avec Bonynge dans « The age of bel canto » : c’est instrumental, il sonne presque comme un basson, mais quelle molesse, quelle atonie, quelle inexpressivité ! Il tente de concilier une émission homogène avec un grave sonore et un falsetto dans l’aigu, ainsi qu’on peut imaginer la technique belcantiste jusqu’au années 1830-40. Intéressant. *

- Il Sogno di Scipione, toujours de Mozart, compte trois ténors, dont le rôle-titre. Les airs sont peu passionnants, mais dans ce genre de partie, un excellent chanteur peut largement faire son miel et soutenir l’attention. ?

- De même, Ozia dans La Betulia liberata est ténor et c’est un rôle de premier plan (contrairement à Ozia dans Juditha Triumphans chez Vivaldi), difficile techniquement – notamment le premier air. On ne sait pas à qui ces airs étaient destinés, malheureusement. **

Années 1780 – 1800 : l’époque classique. Le ténor toujours plus en avant.

- En 1780, suite aux succès napolitains de ses Ifigenia et Ipermestra, Martin y Soler donne Andromaca, avec la célèbre Todi, et un ténor dont je ne connais pas le nom, mais qui devait être à la hauteur de son prédécesseur Ansani, car les parties affrontées par le modeste José Ferrero le dépasse de très loin, dans une version avec orchestration réduite (pour un petit ensemble de cordes). DOC

- Le Giulio Sabino du grand Sarti fut créé au San Benedetto de Venise en 1781. C’est un certain Giacomo Panati qui créa le rôle du primo tenore, nommé Tito (le même que dans L a Clemenza , mais l’histoire n’a aucun rapport). Un second ténor, Giuseppe Desirò, y fut Annio. Les airs sont très beaux, d’une difficulté certaine mais mesurée, au regard d’autres parties de la même époque. C’est aussi une forme annonçant clairement le triptyque récitatif-cantabile-cabalette qui s’impose peu à peu. De grands ténors s’attribuèrent ensuite le rôle de Tito: Adamberger pour Vienne avec Marchesi et Kavalieri, Babbini à Londres avec la Ferrarese et le même Marchesi. Le jeune Filianoti, capté lors de représentations dirigées par Dantone, avec aussi la jeune Prina, est tout à fait convaincant, avec une belle voix bien menée, même si le style pourrait être plus policé encore. Chez Bongiovanni. ***

- Oratorios de nouveau : le Moisè in Egitto de Kozeluch : airs virtuoses chantés par M. Schäfer, direction H. Max. Citons aussi Giob de Ditter Von Dittersdorf, créé en 1786, toujours avec Schäfer. Ces oratorios lorgnent très nettement vers l’opéra. **

- Je laisserai ceux qui connaissent les œuvres en question commenter Il Ritorno di Tobia de Haydn (écrit en 1775, remanié en 1784), dont le rôle titre est destiné à un ténor (Carl Friberth, ramené d’Esterhaza par Haydn). D’ailleurs, soulignons que les ténors prédominent clairement, dans ces œuvres. Peut-on aller jusqu’à supposer que le fameux Adamberger, premier ténor viennois de 1779 à 1798, en fut le premier interprète ? Merci Langridge en tout cas… ***

- Retransmission radio d’Europa riconosciuta de Salieri : nous l’avons vu, le ténor, qui tient le rôle du méchant, n’a qu’un air (sympathique) et se voit relégué dans un emploi secondaire, un peu étonnant pour l’époque. G. Sabbatini, dirigé par Muti, est bien. **

- Antonio Baglioni fut le premier Tito dans L a Clemenza et  Don Ottavio dans Don Giovanni. Il fut aussi le créateur de Colloardo dans La Molinara de Paisiello. On en sait peu sur lui, mais Tito est un rôle assez difficile, et dramatiquement prépondérant, tandis qu’Ottavio, même s’il réclame un parfait belcantiste, est un peu en retrait. ***

- Carlo Vincenzo Allemano, avec sa vraie couleur de baryténor et une technique correcte, a enregistré un Teseo riconosciuto de Spontini (une curiosité). Je n’en sais malheureusement pas plus. ?

- Peu d’informations aussi sur l’Enea nel Lazio de Sarti, composé pour St-Petersbourg. Dernier opéra (plutôt serenata) du maître, en 1799, c’est une œuvre du passé, malgré certains acquis de l’époque (dans la coupe des airs, rondos, ensembles). Le ténor (Latino) s’illustre dans un style assez ancien, dans deux arias, une cavatine et un terzetto. Marat Galiachmetov y est plutôt médiocre dans la gravure Bongiovanni, dirigée un peu lourdement par A. Steinlucht. *

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